Rapport annuel de la présidence 1908-1909

Eugène CHOISY, président
20 novembre 1909

 

 Mesdames et Messieurs,

Les impressions des fêtes du Jubilé universitaire sont certainement encore très présentes à votre esprit, et je ne saurais mieux commencer ce rapport qu’en vous parlant de ces grandes journées, qui nous laissent à tous de si précieux souvenirs.

M. le recteur Chodat nous avait exprimé le désir que la Société Académique fournît aux invités de l’Université l’occasion de se rencontrer, dans une campagne aux environs de la ville, avec le public intellectuel de Genève. Comment n’aurions-nous pas répondu avec empressement à ce vœu si naturel et si honorable, comment n’aurions-nous pas été heureux de contribuer, pour notre part, à faire bon accueil aux hôtes distingués qui s’annonçaient à Genève des cinq parties du monde ? Mais Ia difficulté était de trouver le moyen pratique de réaliser cette rencontre.

La Société Académique ne possède, en effet, aucune vaste et belle campagne aux environs de la ville, et le Comité n’â pas songé un seul instant à dépenser les fonds que vous lui avez confiés, pour payer les frais, toujours considérables, d’une réception.

Nous étions donc fort perplexes et nous nous trouvions dans un grand embarras, quand un de nos concitoyens, qui porte un nom illustre, M. Casimir de Candolle, l’éminent botaniste, nous a très aimablement offert de prendre à sa charge tous les frais d’une garden-party et a mis à notre disposition sa belle campagne du Vallon, à Chêne-Bougeries. Vous devinez combien vive a été notre gratitude et quel accueil enthousiaste nous ayons fait à cette proposition.

Les difficultés les plus sérieuses étant aplanies, il n’y avait qu’à aller de l’avant. M. de Candolle a immédiatement loué une grande tente pouvant contenir mille personnes, et notre trésorier, M. Arnold Pictet, s’est occupé activement de préparer la liste des quelque dix-sept cents invités. Je ne vous dirai pas comment, le jeudi après-midi, 8 juillet, une pluie persistante et un ciel désespérément gris ont empêché nos hôtes d’admirer la belle vue dont on jouit de la terrasse du Vallon ; je vous dirai seulement, sans crainte d’être démenti, que le mauvais temps n’a rien enlevé à la cordialité, à l’entrain, qui ont fait de cette réception un très grand et très brillant succès. Au cours de l’après-midi, le professeur Engier, directeur du jardin botanique de Berlin, M. le professeur Flahaut, de Montpellier, et M. le recteur Chodat – trois botanistes des plus distingués – ont remercié en termes excellents M. et Mme de Candolle de leur accueil si cordial et de leur généreuse hospitalité; ils ont rappelé que Ia famille de Candolle continue à tenir haut et ferme le drapeau de la science botanique genevoise et demeure fidèle, dans les générations actuelles à la tradition si brillamment inaugurée par Augustin-Pyrame et Alphonse de Candolle.

Votre Comité a remis à M. de Candolle, comme témoignage de sa reconnaissance, une adresse enluminée qui lui rappellera, à lui et à sa famille, et après lui à ses descendants, la journée mémorable du 8 juillet. Ce n’est pas tout. Nous avons voulu nous associer M. de Candolle par un lien permanent et intime, et nous l’avons prié de vouloir bien accepter le titre de Président d’honneur de la Société Académique. Ce titre avait été donné, il y a vingt et un ans, lors de notre Fondation, à deux des doyens de la science genevoise, un chimiste et un juriste : les vénérés et regrettés Charles de Marignac et Charles Le Fort.

Nous remercions M. de Candolle d’avoir bien voulu être le troisième président d’honneur de notre association, et nous formons le vœu que, pendant de longues années, il nous continue son bienveillant et affectueux intérêt.

Nous avons créé, il y a plusieurs années, un fonds spécial pour la publication du Tome II de l’Histoire de l’Université de Genève, par le professeur Charles Borgeaud. Ce fonds s’élevait, il y a un an, à plus de 5200 francs. Ii s’est quadruplé pendant cet exercice, grâce à la générosité de deux dames genevoises, ferventes amies de notre Université, Mlle Auguste Sarasin et Mme Charles Rigaud. Ces dames nous ont versé 16.000 francs, soit 8000 francs chacune, dans le but d’assurer Ia suite de la publication de l’Histoire de l’Université de Genève, dans les mêmes conditions que la première partie. « Nous désirons – nous écrivaient-elles, – décharger l’auteur de tout souci matériel d’édition et aussi permettre à l’Université de consacrer à la célébration du 350e anniversaire de sa fondation, aux publications de circonstance et éventuellement à une donation commémorative à la

Bibliothèque publique, les ressources qui ont été mises à sa disposition.»

Vous avez sans doute entre les mains le magnifique ouvrage de M. Borgeaud: l’Académie de Calvin dans l’Université de Napoléon. S’il est moins volumineux que le tome I, il n’est pas moins intéressant, et donne des aperçus nouveaux, inédits et palpitants, sur les destinées de l’Ecole et de la Cité pendant la triste période de la domination étrangère.

Le volume a été remis aux délégués du dehors, ainsi qu’aux nombreux docteurs honoris causa de l’Université de Genève ; il sera adressé aux Universités étrangères.

Le don généreux de Mmes Charles Rigaud et Augusta Sarasin a permis à l’Université de consacrer aux publications de circonstance de ses professeurs et aux frais de réception de ses nombreux hôtes du mois de juillet la totalité du produit du Bazar.

Ce don si bienvenu permet, en outre, d’envisager la continuation de la grande publication entreprise sous les auspices de la Société Académique et de prévoir, du moins quant aux dépenses matérielles de l’édition, que les Annales, richement illustrées, de notre Haute Ecole pourront s’étendre jusqu’à la fin du XIXè siècle.

C’est une œuvre de patience qui, malgré tout l’effort de l’auteur, n’eût pas été possible sans le patriotique concours qu’il a rencontré.

Le tome II, mis en librairie chez Georg et Cie, au prix de 25 francs, au mois de juin, a pu être offert aux souscripteurs du tome I au prix réduit de 15 francs.

Avis aux souscripteurs qui n’ont pas encore profité de leurs droits ; ils sont nombreux, paraît-il, parmi les membres de la Société Académique.

Nous avons remis à tous les invités de l’Université un exemplaire de notre dernier rapport, accompagné de la liste de nos allocations aux diverses chaires de l’Université, pendant les vingt premières années de notre existence. Cette liste a été dressée par les soins de notre zélé et dévoué trésorier, M. le Dr’ Arnold Pictet, que nous sommes heureux de remercier ici publiquement de toute la peine qu’il s’est donnée pour ce travail, comme pour les autres préparatifs du Jubilé.

Le tableau de nos allocations est fort instructif. Il nous montre que des cinq Facultés, c’est la Faculté des Sciences qui a le plus gros appétit et nous demande les plus forts subsides. Aussi avons-nous été très heureux d’avoir pu donner, pendant l’année écoulée, aux autres Facultés des témoignages tangibles de l’intérêt que nous leur portons.

M. le Dr Albert Séchehaye, chargé de la conférence de grammaire historique du français au séminaire de français moderne de Ia Faculté des Lettres, nous a exposé comment une expérience de huit semestres lui avait fait sentir le besoin urgent de mettre entre les mains des étudiants un nouveau « Précis de grammaire historique française. » Aucun des ouvrages existants ne répond bien aux conditions désirées. Ils sont trop complets et trop chers, ou pèchent, au contraire, par trop de brièveté.

Pendant plusieurs semestres, M. Séchehaye a remis à ses auditeurs des feuillies autocopiées rédigées par lui. Ce n’était là qu’un expédient très défectueux et très dispendieux. Il fallait trouver autre chose et mieux, car la connaissance de la grammaire historique du français est exigée des étudiants qui veulent être inscrits membres réguliers du séminaire et qui sont candidats aux épreuves du certificat d’aptitude à l’enseignement du français moderne. Or, cette connaissance manque à la généralité des étudiants ; elle n’est familière qu’à une minorité qui, par hasard, a été au bénéfice de l’éducation philologique que donnent certains gymnases d’Allemagne ou de la Suisse allemande.

M. Séchehaye a été amené ainsi, par la force des choses, à rédiger un Précis de grammaire historique du français, qui comprendra trois parties. I Histoire dessons. II Histoire des mots. III Histoire des flexions.

Les maîtres du séminaire et du cours de vacances de français moderne ont déjà publié, pour leurs diverses conférences, plusieurs recueils de morceaux choisis ou manuels qui ont rendu de grands services. Ces ouvrages portent sur leur couverture la mention de l’Université. Ils sont connus et appréciés à l’étranger. L’administrateur du séminaire, M. le professeur Bernard Bouvier, nous écrit qu’il est très heureux que M. Séchehaye veuille bien enrichir la collection de ces ouvrages spéciaux d’un manuel de grammaire historique. L’impression de l’ouvrage reviendra à 750 francs environ.

Le Comité, désireux de conserver son entière liberté d’action pour le cas où une demande analogue lui serait adressée, a voté une allocation de 500 francs au séminaire de français moderne, dans la pensée que celui-ci appliquera cet argent à la publication des deux premiers fascicules du Précis de M. Séchehaye. Un détail qui a son importance : les épreuves doivent être revues par MM. Ferdinand de Saussure et Ernest Muret, ce qui garantirait, si cela était nécessaire, la valeur scientifique de cet ouvrage.

Après la Faculté des Lettres et son séminaire de français moderne, la Faculté de Médecine s’est adressée à nous, dans la personne de M. Oscar Beuttner, professeur de clinique obstétricale et gynécologique. Autant Ia clinique de M. Beuttner est admirablement installée dans la nouvelle Maternité, autant son laboratoire est pauvre et dénué de toute une série d’instruments indispensables.

M. Beuttner nous écrivait l’automne dernier : « Il n’y a au laboratoire qu’une seule étuve pour la bactériologie, ce qui ne permet pas de faire les recherches sur les sérums. Pas de balance de précision pour faire des analyses chimiques utiles de liquides pathologiques. Pas de microtome à paraffine permettant de faire facilement les coupes sériées, devenues tout à fait nécessaires dans les recherches histopathologiques. Mais ce qui manque encore le plus, ce sont les microscopes. Le laboratoire n’en possède qu’un seul, d’un modèle ancien et muni de lentilles détériorées. Or, cet unique microscope doit servir simultanément aux recherches courantes et aux travaux de micrographie. Il est utilisé par neuf personnes : le professeur, le chirurgien adjoint, le chef du laboratoire, le sous-chef de clinique, les deux internes et les trois externes. »

Cette situation déplorable était rendue pire encore par le fait que ces messieurs ne sont libres qu’aux mêmes heures pour les travaux de laboratoire.

Nous ne pouvions qu’être sympathiques à une demande aussi justifiée, mais nous estimions, avec le Bureau du Sénat, qu’il était inadmissible que l’Etat ne fournit pas les laboratoires de la Maternité des instruments absolument indispensables. Notre rôle n’est pas de nous substituer à I’Etat, mais de l’aider. C’est pourquoi nous avons décidé d’al1ouer un subside de 1000 francs, à la condition que l’Etat voterait une somme égale pour le laboratoire de M. le professeur Beuttner.

Nous avons écrit dans ce sens au Département de l’Instruction publique, et finalement nous avons été heureux de recevoir de M. le conseiller d’Etat Rosier une réponse favorable, accompagnée de remerciements à notre adresse. Le Conseil d’Etat, prenant en considération notre demande, a ouvert au Département de l’Instruction publique un crédit de 1 100 francs pour contribuer, concurremment avec la Société Académique, à l’achat d’instruments destinés au laboratoire de la clinique gynécologique et obstétricale de l’Université.

Une autre demande de subside pour instruments destinés aux recherches histo-pathologiques nous est venue d’un établissement extra-Universitaire, l’Institut anti-cancéreux.

Outre les travaux scientifiques purs, destinés à faire avancer, si possible, la question du cancer, l’Institut se propose, comme but non moins important, d’appliquer aux malades les méthodes thérapeutiques qui ont déjà fait leurs preuves à l’étranger.

Or, d’observations multipliées à l’Institut Pasteur, de Paris, il ressort que la méthode des sérums spécifiques jouit d’une influence favorable incontestable sur l’évolution des tumeurs malignes et apporte presque toujours chez les malades, même inopérables, atteints du cancer, une amélioration dans leur état et une survie importante. Cette méthode a pour base d’immunisation d’animaux tels que chèvres, veaux, moutons, par l’inoculation des tumeurs mêmes ou du sang des animaux cancéreux.

L’Institut anti-cancéreux aurait voulu que nous l’aidions à acheter une table d’opération pour la contention de ces animaux, afin d’être en état de fournir aux chirurgiens le sérum en question.

Nos statuts disant expressément (article 3) que le but de la Société Académique est de contribuer de tout son pouvoir au progrès du haut enseignement dans tous les domaines, et particulièrement au développement de l’Université, notre Comité avait décidé antérieurement qu’il examinerait les demandes de subsides qui pourraient lui être faites par l’Institut, particulièrement celles pour achat d’instruments.

Nous avons donc alloué à l’institut anti-cancéreux une somme de 600 francs à titre exceptionnel, pour l’achat d’un instrument utile, à la condition qu’au cas (nullement désirable et très peu probable) où l’Institut se dissoudrait, f instrument reviendrait à Ia Faculté de Médecine.

Nous avons été informés que notre don, ajouté à celui de la Société auxiliaire des sciences et des arts, servira à l’achat d’une étuve pour la préparation des vaccins anti-cancéreux.

Nous avons été invités à l’inauguration de l’Institut, et M. le Dr Arnold Pictet nous y a représentés. Nous faisons tous nos vœux pour que les travaux de cet établissement contribuent à faire avancer le problème du cancer et de sa guérison !

L’anuée dernière, mon prédécesseur vous disait comment les philologues modernes reconnaissent aujourd’hui l’importance de l’emploi du phonographe ou du gramophone pour l’étude des langues vivantes.

Cette méthode, M. Georges Thudichum, privat-docent à la Faculté des Lettres, a été le premier à l’employer dans l’enseignement de la phonétique au séminaire de français moderne. La Société Académique avait voté 500 francs à M. Thudichum pour l’achat d’un phonographe avec accessoires. Cette somme n’a pas été employée tout entière, M. Thudichum ayant trouvé à acheter d’occasion un excellent appareil à Paris ; aussi a-t-il pu, avec un subside supplémentaire de 150 francs que nous avons été heureux de lui accorder, acheter encore deux instruments : 1° : un grand pavillon en remplacement de celui qu’il avait obligeamment prêté et dont ii avait besoin chez lui ; 2° : un gramophone à disques.

La Faculté de Droit a vivement appuyé auprès de nous une demande de subside de M. le professeur Paul Moriaud, pour la création d’un Séminaire de Droit romain.

M. Moriaud voudrait organiser un séminaire qui rendrait dans la Faculté de Droit les mèmes services que les laboratoires que connaissent depuis longtemps les Facultés des sciences, il s’agit donc d’une création d’un genre nouveau. Il ne s’agit pas simplement de présenter au professeur et de discuter en présence des autres élèves des travaux accomplis par un étudiant travaillant seul, il s’agit surtout d’un travail quotidien poursuivi sous Ia direction et avec l’aide constante du maître.

M. Moriaud a dressé la liste des ouvrages de fonds à acquérir. Ii n’y a fait figurer que le nécessaire, ce qui doit être de consultation courante, et le total dépasse 2500 francs. Cette somme peut paraître élevée, mais elle ne l’est pas en réalité, si l’on considère combien il est important que les étudiants soient initiés à la vraie méthode du travail. Or, c’est là une initiation que donne le laboratoire ou le séminaire, et non pas le simple fait de suivre assidûment et consciencieusement les cours du professeur. M. Moriaud nous écrivait : « j’espère que la Société Académique, dont je sais l’impartiale sympathie pour tous les ouvriers de science à notre Université, accueillera favorablement la demande d’un professeur appartenant à une Faculté qui n’a point été jusqu’ici bien exigeante. »
Le Comité a répondu en votant un subside de 2000 francs au Séminaire de Droit romain.
Mesdames et Messieurs, il eût été bien extraordinaire que notre 21ème exercice se terminât sans que nous eussions rien fait pour la Faculté des sciences.

Or, nous avons reçu des dons importants de plusieurs particuliers, en faveur d’une création nouvelle, très intéressante, dont il me reste maintenant à vous entretenir.

M*’ Hélène Claparède, désireuse, à l’occasion du Jubilé, de rappeler la mémoire de son regretté père, feu le professeur Edouard Claparède, nous a fait part de son intention d’offrir à l’Université, par l’entremise de la Société Académique, une somme de trois mille francs. Dans la pensée de Mme Claparède, cette somme constituerait le noyau d’un fonds pour l’institution et l’entretien d’une station de zoologie lacustre, attachée à la chaire de zoologie et d’anatomie comparée.

Edouard Claparède avait occupé cette chaire avec la plus haute distinction, et il avait consacré une grande part de son activité à l’étude des animaux inférieurs ; il est un des premiers naturalistes qui se soient installés au bord de la mer, et il s’est rendu sur les côtes de Norvège et sur celles du golfe de Naples, pour y poursuivre des études systématiques sur la faune marine.

L’idée de faciliter des recherches du même genre sur la faune du lac de Genève lui eût été particulièrement chère.

Notre Comité a accepté très volontiers de gérer le fonds institué par M. Claparède, en souvenir d’un homme qui a beaucoup aimé notre vieille Académie et a grandement contribué à maintenir le renom scientifique de Genève. Le fonds portera le nom de Fonds Edouard Claparède ; il pourra être augmenté, dans l’avenir, de dons et de legs, afin de fournir aux zoologistes de notre Faculté des sciences les moyens qui leur manquent actuellement de poursuivre des investigations scientifiques sur la faune du lac de Genève.

L’initiative de Mme Claparède vient à son heure, car des instituts analogues existent au bord de plusieurs lacs, en Angleterre, en Norvège, etc, Un capital de quinze à vingt mille francs serait nécessaire pour acheter un bateau et des appareils de pêche.

L’Université s’intéresse vivement à la création de la station de zoologie lacustre, car elle estime que cette création rendra de très grands services à l’enseignement. Le don de Mme Claparède en a provoqué d’autres, de M. Alfred de Claparède, ministre de Suisse à Berlin (5oo francs), de M. Edouard Claparède, professeur à notre Université et membre de notre Comité (1000 francs), de M. Arthur de Claparède, géographe et publiciste (1000 francs), de M. et Mme Auguste de Morsier (100 francs), soit au total 5600 francs, auxquels sont venus s’ajouter un don de la 1ère classique, volée de 1880-1881, à l’occasion du Jubilé du Collège (225 francs), et une allocation de 1000 francs de la Société Académique, soit un total de 6825 francs.

L’approche du Jubilé a encouragé un bon nombre de personnes à s’inscrire comme membres de notre Société. Mmes Hentsch-Navilie, Cramer-Sarasin, Eugène Choisy, Mlles M.-A. Vernet, Hélène Gautier et MM. Eugène Ritter, Augustin de Candolle, Jean Lombard, Eugène Des Gouttes et Arthur King, ont versé la contribution statutaire de 100 francs. Les familles Reverdin, Galopin et Pictet nous ont envoyé des dons en souvenir de Mme Reverdin-Mayor, de M. Adolphe Galopin et de M. Ernest Pictet, Les Sociétés de Belles-Lettres, de Zofingue et des Étudiants français nous ont versé comme d’habitude une somme prélevée sur le produit de leurs soirées, et MM. Edouard Claparède, Barthélémy Bouvier, ainsi que Mme Jules Audéoud, nous ont fait des dons qui ont contribué à grossir le fonds capital ordinaire de la Société Académique.

Le fonds auxiliaire de la Bibliothèque s’est accru d’un don de 3000 francs de M. H.V. Aubert, en souvenir de Mme Edouard Aubert, de M. Edgar Aubert et de Mlle Jeanne Aubert.

A tous les amis de notre œuvre que la mort nous a ravis, nous gardons un respectueux et reconnaissant souvenir ; ce sont en particulier Mlle Anna Sarasin, M. V. Corbaz, M. Ernest Pictet, notre dévoué banquier, les professeurs Ernest Naville et J.-J. Gourd, nos deux plus éminents philosophes genevois.

Nous voudrions que, chaque année, les vides causés par la mort fussent comblés et au delà, non seulement par l’accession de personnes appartenant au public intellectuel de Genève, mais aussi par l’accession de tous les professeurs et privat-docents de notre Université. Nous deviendrions ainsi le grand syndicat des amis des hautes études.

Nous avons le plaisir de vous informer que la Société d’étudiants Stella s’est inscrite comme membre collectif.

Pour en revenir au Jubilé, disons que nous avons participé à l’exposition rétrospective organisée par l’Université dans le vestibule de la Bibliothèque publique, en exposant une collection de nos rapports et divers autres documents. Enfin, l’Université a eu la gracieuseté d’envoyer à notre président un exemplaire de la Plaquette du Jubilé, en témoignage de reconnaissance pour les services rendus au Jubilé par la Société Académique.

Vous me permettrez, Mesdames et Messieurs, en terminant ce rapport, de vous communiquer les remarques, à mon sens très justes et très intéressantes, qu’un théologien anglais, le principal Carpenter, de Cambridge, a publiées dans le journal des Eglises unitairiennes The Inquirer (numéros des 17 et 24 juillet 1909).

L’éminent professeur se félicite de la coïncidence du septième Jubilé de l’Université avec le quatre centième anniversaire de la naissance de son fondateur, Jean Calvin. Il constate que, pendant sa longue histoire, l’Université de Genève a ajouté maint nom illustre à ceux de ses premiers maîtres. Actuellement réorganisée selon les exigences modernes des hautes études, l’Université a vu le nombre de ses étudiants s’accroître rapidement, en sorte qu’il est sept fois plus élevé qu’il y a trente ans. Les traits qui ont le plus frappé le principal Carpenter, dans la grande commémoration de juillet, sont : le caractère international de l’Université et son intime union avec la vie et l’histoire de la Cité.

La séance solennelle du 8 juillet, à Saint-Pierre, a produit une impression saisissante sur notre hôte. « Une vaste assemblée, dit-il, remplissait entièrement la grande cathédrale jusque dans les moindres recoins. Spectacle profondément intéressant pour celui qui en comprenait toute la signification et toute la portée. A Aberdeen, au quatrième centenaire de l’Université, en 1906, la petite chapelle universitaire ne pouvait contenir qu’un petit nombre de délégués en plus de l’état-major universitaire. A Iéna, au trois-cent-cinquantième anniversaire de l’Université, en I908, la grande église était remplie de princes et de ducs, de hauts fonctionnaires de l’Etat, d’une multitude d’officiers ; il n’y avait presque point d’invités étrangers. A Genève, à Saint-Pierre, on voyait sans doute les membres des conseils municipaux et cantonaux, les représentants des cantons et le président de la Confédération en personne, mais on voyait surtout des délégués, des savants d’environ trente pays différents, venus de toutes les parties du monde. Non seulement presque tous les Etats de l’Europe étaient représentés, mais il y avait des délégués des Etats-Unis et du Canada, du Mexique, du Brésil, de la République argentine, de l’Egypte et des Indes, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande ; soit en tout des représentants de deux cent cinquante Universités et sociétés savantes. Détail caractéristique : Dans cette immense assemblée, excepté les membres de l’Institut de France, nul ne portait une épée. Représentant des nationalités très différentes les unes des autres, tous s’accordaient à rendre ensemble hommage à une même idée, et il n’y avait entre eux aucune rivalité, sinon celle de faire le plus possible pour le progrès de la vérité et pour le bien de l’humanité. Les Eglises avaient mis de côté leurs préventions et renoncé à leurs anathèmes, et le vénérable président de la Confédération, M. Deucher, un catholique, rendait un hommage éloquent à Ia largeur de vues, à l’énergie féconde des fondateurs de l’Université, Calvin et Théodore de Bèze, et il soulignait l’importance que ces hommes donnaient à la formation du caractère. »

« En somme, si l’on réfléchit à la période de l’histoire que rappelait ce Jubilé, à la diversité des intelligences qui y étaient rassemblées, au caractère mondial des personnalités qui y étaient réunies, au concours et à la coopération des éléments politiques et sociaux qui était à la base de cette commémoration, si l’on réfléchit enfin à l’unité des aspirations morales et spirituelles qui s’y manifestait en dépit de grandes différences théologiques et ecclésiastiques, cette cérémonie est peut-être la plus émouvante à laquelle j’ai jamais eu le bonheur d’assister. »

Mesdames et Messieurs, le souvenir de ces journées inoubliables (c’est le terme qui, de l’aveu de tous, les caractérise) demeurera toujours gravé dans les cœurs genevois, et nous nous souviendrons que noblesse oblige, nous nous souviendrons que tous, nous devons soutenir de toutes nos forces, matériellement et spirituellement, notre chère vieille et grande Ecole héritière d’un si glorieux passé, l’Académie de Calvin, l’Université de Genève !