Rapport annuel de la présidence 1909-1910
Marc PETER, président
8 décembre 1910
Mesdames et Messieurs,
Votre président n’a pas, cette année, à célébrer V. dans son rapport, les splendeurs d’un jubilé, où, grâce à l’amabilité et à la générosité d’un de ses membres, la Société Académique tint dignement sa place. Mais si l’exercice qui vient de s’écouler n’a pas eu de garden-party à enregistrer dans ses annales, il n’en témoigna pas moins de la vitalité de notre Société, tant par les dons importants qui nous furent adressés que par les nombreuses allocations distribuées aux différentes facultés de notre Université.
Notre première pensée va donc à tous ceux qui voulurent bien accroître notre fortune, et nous permettre d’atteindre toujours mieux et plus complètement notre but. C’est ainsi que nous avons reçu des legs de Mme Amélie Stuber, 100 francs; de Mme veuve Gomarin, 1000 francs, et de Mlle Töpfer, 1000 francs.
En souvenir du regretté professeur Ernest Martin, sa famille nous a envoyé 1000 francs pour notre fonds capital ordinaire, et 5oo francs pour le fonds auxiliaire de la Bibliothèque. La famille du professeur Marc Doret, enlevé trop tôt à notre sympathie, nous a fait parvenir la somme de 300 francs. Enfin, nous avons reçu des dons de M. Arthur King, 100 francs ; de M. Louis Gardy, 25 francs ; de M. Vuagnat, 80 francs ; de la Société de Belles-Lettres,50 francs, et de notre président d’honneur, M. Casimir de Candolle, 500 francs.
A tous ces généreux donateurs, nous exprimons notre plus sincère gratitude.
Se sont inscrits, en outre, comme membres à vie, et ont droit également à tous nos remerciements, M. le professeur Sarrasin, M. Arthur Sauter, M. Lucien de La Rive, Mme Marie Brocher, M. Victor Martin, qui ont payé la cotisation statutaire de 100 francs, et la Société des Vieux-Zofingiens qui a versé 250 francs.
Enfin, des dons spéciaux sont venus enrichir le fonds Edouard Claparède qui s’est augmenté, pendant l’année 1909-1910, des dons de M. Théodore Flournoy, 300 francs ; de M. Hugo de Claparède, 250 francs ; de M. Victor Demole, 25 francs ; de M. Lucien de La Rive, 50 francs ; de M. Fernand Chenevière, 20 francs. Puis, une somme de 3000 francs nous fut envoyée en dernier lieu par un généreux ami qui nous a prescrit de taire son nom. Grâce à tous ces donateurs, que nous remercions bien vivement, le fonds atteint maintenant la somme de 11.200 francs, et le moment n’est pas bien éloigné où nous pourrons commencer à mettre notre projet à exécution.
La station de zoologie lacustre a été fondée, on s’en souvient, par un premier versement de M* » Hélène Claparède et pour perpétuer, à l’occasion du jubilé de 1909 de notre Université, la mémoire de l’illustre savant genevois que fut le professeur Edouard Claparède. Le but de la station est de procurer aux étudiants et aux naturalistes qui veulent étudier la faune de notre lac le matériel indispensable à ces recherches, et en tout premier lieu, un bateau à moteur, dont le coût absorbera une bonne partie du capital actuel. La commission déléguée par votre Comité, pour la direction de ce fonds, et composée de MM. les professeurs Yung, Ed. Claparède et Dr Arnold Pictet, est déjà en pourparlers pour l’acquisition d’un bateau d’occasion, qui répondrait aux conditions requises pour le genre de service auquel on le destine. Mais, une fois cette acquisition faite, le capital ne sera plus suffisant pour entretenir, de ses intérêts, le bateau et subvenir aux frais qu’occasionneront encore les recherches lacustres.
C’est pourquoi votre Comité recommande tout spécialement le fonds Edouard Claparède à Ia sollicitude des amis de la Société Académique et de l’Université, afin que de nouveaux dons viennent lui permettre de mener à bien l’œuvre digne de l’intérêt de tous, qui a vu le jour à l’occasion de la plus grande manifestation intellectuelle genevoise de notre siècle. Les dons, même les plus modestes, sont reçus avec reconnaissance, et peuvent être versés chez MM. G. Pictet et Cie, 12, rue Diday.
Nous avons eu le regret de perdre dernièrement M. Gustave Moynier, qui nous avait prouvé, il y a quelques années, la part qu’il prenait à notre œuvre, en nous faisant un don de 20.000 francs, dont les intérêts devaient être affectés à la Bibliothèque publique pour l’achat de périodiques. Il fut créé alors, dans notre Bibliothèque, une salle spéciale pour les périodiques qui porte, comme vous le savez, le nom de Salle Moynier, et qui rend de grands services. Exclusivement réservée à la lecture des dernières livraisons parues, des publications périodiques que reçoit la Bibliothèque, elle contient environ 1200 publications intéressant toutes les branches humaines. Dans ce nombre figurent une cinquantaine de revues de sciences sociales, qui sont payées au moyen du fonds Moynier. La Société Académique tient donc à s’associer aux regrets unanimes qui ont été exprimés de toutes parts lors du décès de M. Gustave Moynier.
Vous savez, mesdames et messieurs, que, depuis l’an dernier, la Société Stella fait partie de la Société Académique. Afin de lui permettre de nous déléguer dorénavant un de ses membres, en qualité de secrétaire, comme font Zofingue et Belles-Lettres, nous avons décidé de ne plus compter nos secrétaires parmi les quinze membres du Comité prévus par nos statuts.
Cela nous permettra de nous adjoindre deux nouveaux membres, que vous aurez à désigner tout à l’heure, avec ceux dont la réélection vous est proposée, sans pour cela nous priver de la collaboration de nos secrétaires, dont nous apprécions toujours bien vivement les services.
Voici, maintenant, comment furent distribuées, pendant le dernier exercice, les ressources mises à la disposition du Comité et gérées par notre trésorier, M. Arnold Pictet, avec tout le dévouement que vous lui connaissez.
Ce lut d’abord M. le professeur Amé Pictet, qui sollicita l’appui de la Société Académique pour compléter les collections de produits et d’appareils de l’Ecole de chimie. Aucun crédit spécial n’est, en effet, affecté par l’Etat à l’entretien de ces collections, qui, n’ayant pas été complétées depuis de nombreuses années, n’étaient plus à la hauteur d’un enseignement moderne de la chimie. M. le professeur Pictet demandait dans ce but une somme de 500 francs, qui lui Iut accordée.
Puis, M. Waldemar Deonna, chargé d’enseigner l’archéologie grecque, et M. Camille Martin, qui donne un cours d’histoire de l’art, attirèrent tous deux l’attention du Comité sur le fait qu’en l’absence de clichés permettant d’illustrer leur enseignement, celui-ci risquait de manquer d’intérêt. Votre Comité partagea cette manière de voir, et vota 300 francs pour l’achat de clichés d’archéologie grecque, et 150 francs pour ceux destinés à l’histoire de l’art. Il nous fut demandé ensuite, par M. le professeur Guye, en vue de l’acquisition d’une machine à calculer, une somme de 953 francs, qui lui fut allouée. Des travaux, récemment entrepris, sur le frottement intérieur des solides, rendaient en effet cette acquisition absolument urgente, et nous avons été heureux d’en doter le laboratoire de physique, à la condition que cet appareil puisse également être utilisé par les autres professeurs de la Faculté des Sciences, en particulier, par les professeurs de mathématiques.
M. le professeur Duparc désirait, de son côté, acquérir, pour le laboratoire de minéralogie et pétrographie, une collection de roches, avec coupes microscopiques, nécessaires à son enseignement. Les ressources limitées de son laboratoire ne permettant pas à M. Duparc de faire un achat de 1000 francs, votre Comité décida de lui allouer cette somme.
Et, comme rien de ce qui est scientifique ne nous est étranger, nous avons coopéré ensuite, par un versement de 300 francs, à l’ascension du ballon Mars organisée par M. le professeur Raoul Gautier. La fameuse comète resta invisible, mais les voyageurs rapportèrent, paraît-il, une quantité d’observations des plus intéressantes.
La Faculté de Théologie vint, à son tour, par l’intermédiaire de MM. les professeurs Balavoine et Choisy, solliciter notre appui pour un achat de volumes destinés au Séminaire d’histoire ecclésiastique et des dogmes. Une somme de 350 francs leur fut allouée.
Vous savez, mesdames et messieurs, que les achats de microscopes ont toujours joué un grand rôle dans l’histoire de la Société Académique. Ce sont là de précieux auxiliaires de nos professeurs et de nos étudiants, mais qui ont un défaut, celui de coûter cher ; et, comme il en faut toujours davantage, à mesure que le nombre des étudiants augmente, souvent nous sommes appelés à subventionner tel ou tel laboratoire pour l’achat de ces instruments.
Nous avons ainsi permis cette année à M. le professeur Yung l’acquisition d’un grand microscope à l’usage des étudiants qui préparent leur doctorat au laboratoire de zoologie en lui allouant, dans ce but, la somme de 525 francs.
Puis, M. le professeur Chodat nous fit part que le matériel de son laboratoire, datant de vingt ans, était en partie hors d’usage ou incomplet, et qu’il avait besoin de 3000 francs pour l’achat de vingt microscopes. Nous lui en avons accordé dix, soit 1500 francs, et lui avons promis 500 francs, qui seront versés dès que l’Etat aura fourni le complément de 1000 francs. Notre Comité a estimé, en effet, que la Société Académique devait rester dans son rôle, qui est de contribuer seulement aux achats d’appareils dont les laboratoires ont besoin, et qu’il est légitime que l’Etat fasse le reste.
Une somme de 275 francs a été votée ensuite en faveur de l’enseignement géographique des animaux terrestres, qui sera donné, pour Ia première fois cette année, par M. le Dr Carl, privat-docent ; cette somme servira à acheter des cartes zoogéographiques, ainsi que des clichés pour projections lumineuses.
Nous avons enfin accordé une allocation de 500 francs au Comité chargé de recueillir des fonds pour subvenir aux frais de la mission de M. le professeur Nicole, qui retourne au Caire continuer ses recherches de papyrus.
Et voici, mesdames et messieurs, le bilan de notre activité pendant l’année 1909-1910 ; ainsi que je le disais au début de ce rapport, l’exercice écoulé ne fut point indigne des précédents : notre fortune s’est accrue de près de 8000 francs, et nous avons alloué 9250 francs, dont 7000 francs déjà payés, aux œuvres diverses qui sont venues nous solliciter.
Peu à peu, la Société Académique augmente ainsi ses ressources, en même temps que son utilité grandit, et cependant le nombre de ses membres reste à peu près stationnaire. De tous les étudiants qui, depuis la fondation de notre société, ont quitté l’Université, une fois leurs études terminées, bien peu figurent sur notre liste. Il semble pourtant que s’inscrire chez nous devrait être le premier devoir de tous ceux qui ont profité de notre enseignement supérieur, et qui ont pu se rendre compte, pendant les années passées à l’Université, de tous les services qu’une société comme la nôtre est appelée à rendre à l’Alma Mater.
Et notre vœu, souvent exprimé dans nos rapports annuels, serait de voir également le public genevois s’intéresser toujours plus nombreux à notre société.
Cela, non pas tant à cause du bénéfice matériel qui en résulterait pour notre œuvre, que pour l’appui moral qui nous serait ainsi donné. Cette coopération de tous au but que nous poursuivons serait le complément nécessaire de la création de l’Académie de Calvin, qui fut l’œuvre commune de tout le peuple genevois.
Ce rêve d’une Société Académique, dont chacun, à Genève, se croirait obligé de faire partie, n’a rien d’impossible ; en le réalisant, le public genevois ne ferait que rendre un nouvel hommage à cette instruction, qui fut, comme le dit si bien l’inscription mise sur la façade de l’Université : « La garantie fondamentale de nos libertés. »