Rapport annuel de la présidence 1928-1929

Ch.-F. PFAEFFLI, président
16 novembre 1929

 

 

Mesdames, Messieurs,

Une fois de plus vous voici réunis pour prendre connaissance et pour juger de la manière dont votre Comité s’est acquitté de la tâche que vous lui aviez confiée.
Vous êtes venus, pressés sans doute par t’intérêt que vous portez à l’œuvre soutenue de vos deniers, attirés aussi par la conférence traditionnelle qui, rompant la monotonie de la séance administrative, vous laisse ensuite l’agréable souvenir d’un régal de l’esprit, mais désireux surtout d’affirmer par votre présence l’attachement qui, par tant de liens intellectuels et sentimentaux, vous unit à l’Université.
La Société Académique a entamé au début de cet exercice la décade qui la conduit à son cinquantenaire.

Elle franchit le seuil de cette nouvelle étape soulagée des préoccupations que le long désarroi d’après guerre lui avait infligées. Ainsi que vous le verrez par le rapport de notre Trésorier sa situation financière est saine, prospère même, puisque la fortune dont elle peut disposer s’est encore accrue. Mais cet heureux état de nos biens, loin qu’il nous incite à imiter du carthaginois la dangereuse quiétude, doit nous pousser, au contraire, à redoubler d’ardeur dans l’accomplissement de la tâche qui nous est dévolue.
Toutefois, avant de diriger nos regards vers l’avenir, reportons-les sur l’exercice terminé le 30 septembre dernier, dont nous avons à vous retracer la marche.
Le nombre de nos membres, déduction faite des pertes particulièrement douloureuses que nous avons subies cette année, est en notable augmentation.

Si le temps nous a manqué malheureusement, à cause de l’impression tardive du rapport précédent, pour donner l’ampleur désirable à notre propagande, nous n’en avons pas moins recueilli, à ce jour, plus de trente adhésions, au nombre desquelles nous avons la satisfaction d’enregistrer comme membres à vie: MM. Lucien Chalumeau, Robert Hentsch, Ernest Vernet, Henri Werner, Alexandre Wissmer et Mme Jules Roux-Eggly. A cette cohorte, trop faible à notre gré et que nous vous prions instamment de renforcer par votre action individuelle, nous souhaitons la plus cordiale bienvenue au sein de Ia Société Académique.

Hélas ! Mesdames et Messieurs, le destin veut que cet accueil joyeux soit assombri par le deuil. Dix-huit de nos membres, arrachés de ce monde, laissent dans nos cœurs un souvenir ému que nous leur garderons fidèlement. Nous ne pouvons les citer tous. Qu’il nous soit permis cependant de rappeler les noms de ceux d’entre eux qui occupèrent à l’Université ou dans notre Société une place éminente : les professeurs Jacques-Louis Reverdin, Gustave Humbert, Emile Chaix, Edouard Long, les docteurs Albert Reverdin et Albert Bétrix, M. Jules Micheli et Mlle Alice Favre, ces derniers membres donateurs.
Deux d’entre eux ont donné à notre œuvre un dernier témoignage d’affection: Mlle Alice Favre, par deux legs, l’un au fonds ordinaire, l’autre au fonds auxiliaire de la Bibliothèque publique et universitaire ; le professeur Edouard Long par un don que nous a fait parvenir sa veuve avec un touchant message.
A ces héritages sont venus s’ajouter un don de la famille du professeur Jacques-Louis Reverdin en souvenir de l’intérêt qu’il portait à notre Société, un don de M. Edmond Flournoy, pour le fonds Edouard Claparède, enfin une somme importante versée au fonds ordinaire par l’un de nos collègues qui désire garder l’anonymat.
D’autre part la liquidation de la succession de M. Albert Vivien, décédé en r9r5, s’étant opérée, la part qu’il nous avait léguée après extinction d’usufruit nous a été remise. Tant de gestes généreux, si conformes au civisme genevois, appellent de notre part la plus vive reconnaissance.

Mesdames et Messieurs, l’activité que déploie votre Comité, avant de prendre des décisions mûrement pesées, lui procure de fréquentes occasions de contact avec le Recteur de l’Université, comme avec le Président du Département de l’Instruction publique.
Nous serait-il loisible de ne point leur témoigner notre gratitude dans ce rapport, alors que M. le Conseiller d’Etat Albert Malche entretient avec nous les relations les plus cordiales et que M. le Recteur Charles Werner nous prête avec tant de bonne grâce son appui au cours des multiples démarches qui précèdent la remise des subsides dont vous allez apprendre la répartition.

Nous commencerons cette énumération par les allocations qui s’adressent à l’Université tout entière.

Depuis deux ans déjà, l’échange d’étudiants entre la Suisse et les Etats-Unis d’Amérique avait été décidé en principe entre un comité formé des recteurs de nos Universités et l’Institut d’Education internationale de New-York. A leur appel, les Universités d’outre-mer ont immédiatement offert des bourses, dont quelques-unes du montant de 1500 dollars, grâce auxquelles près de vingt étudiants suisses jouissent actuellement de l’hospitalité des luxueuses Ecoles américaines. L’Université de Zurich et le Polytechnicum ont donné l’exemple de la réciprocité en offrant chacun une bourse de 3.000 francs dont bénéficient deux étudiants de la grande République.

Il était donc urgent que notre Université prît part à des échanges qui lui permettront d’accueillir à son tour des étudiants du Nouveau-Monde, tout en lui facilitant l’obtention de bourses américaines en faveur des étudiants genevois. Nous avons accordé bien volontiers notre aide à Ia création d’une bourse de 3.000 francs en nous associant au fonds des anciens étudiants pour une durée de trois ans. Elle s’appellera sur notre proposition « Bourse Albert Gallatin » portant un nom illustre à Washington comme à Genève et qui symbolise une amitié séculaire et de grand prix.

Nous avons encore prêté notre concours dans le même domaine, en donnant une subvention de 6.000 francs à la fondation par le groupement des professeurs d’histoire des différentes facultés d’un « Centre universitaire d’études historiques ». Celui-ci a pour but d’intensifier l’enseignement établi, soit par des travaux pratiques en utilisant pour des démonstrations ou des recherches les locaux et les bibliothèques d’institutions telles que les archives d’Etat, la Société d’Histoire ou les musées, soit en faisant des excursions, soit en appelant pour des conférences des savants étrangers. Le succès des leçons données l’hiver dernier nous assure de la nécessité et de la réussite de ce nouvel organisme.

Passons maintenant aux allocations spéciales : nous en avons eu de nombreuses à distribuer.

La station de zoologie maritime de Wimereux offre aux élèves du professeur Guyénot la possibilité d’étudier, dans les conditions les plus favorables d’observation, les animaux marins. Sous la direction de leur maître, en une collaboration plus familière, de nombreux travailleurs y ont entrepris des recherches dignes d’être publiées ; quelques-uns y ont senti naître en eux la vocation de naturaliste. Sollicités d’assurer la continuité d’un si précieux complément à l’enseignement officiel en renouvelant une garantie que nous avions donnée à deux reprises déjà, nous avons fait le nécessaire pour qu’une table de travail soit réservée pendant trois ans dans cette station aux étudiants de notre ville.
Aux travaux qui s’exécutent dans le laboratoire de chimie technique du professeur Briner manquait un spectroscope suffisamment perfectionné pour atteindre à l’exactitude qu’exige en particulier l’étude des rayons ultra-violets. Nous avons contribué pour la moitié à l’acquisition de ce puissant moyen de travail en exprimant le désir qu’il soit mis à la disposition du laboratoire de physique pour ses propres recherches.

L’Ecole de Chimie abrite encore une discipline dont les ressources ne sont pas en rapport avec son développement, c’est l’Ecole de Prospection. Le professeur Duparc y forme des ingénieurs chimistes spécialisés dans la recherche, l’estimation et la mise en exploitation de gisements miniers les plus divers. Les jeunes diplômés sortent de cette école avec une préparation si remarquable qu’ils sont engagés longtemps d’avance par les compagnies étrangères. Cependant, pour que leur formation soit complète, il est indispensable qu’ils voient au cours de leurs études le plus grand nombre de gisements et d’usines de traitement. Les voyages d’études organisés pendant les vacances sont souvent trop dispendieux pour beaucoup de ces jeunes gens, aussi ont-ils créé, avec l’appui de leur maître, au sein de leur Association, un fonds de voyage destiné à faciliter les déplacements au moins fortunés d’entre eux. Notre participation à la création de ce fonds vous paraîtra certainement justifiée par les beaux résultats qu’elle permet d’entrevoir.
C’est pour des motifs du même ordre que nous avons accordé un subside à M. Paréjas, chargé de cours. L’Université Harvard l’invitait, défrayé gracieusement dès son arrivée sur le sol américain, à rejoindre l’expédition géologique qu’elle avait organisée cet été dans les Montagnes Rocheuses du Canada sous la direction du professeur Collet. Nous avons pensé que favoriser l’accomplissement de ce voyage, qui comportait de grands frais d’équipement, c’était permettre au témoignage d’estime scientifique décerné à l’un des nôtres de se réaliser en intensifiant le rayonnement de notre vieille Académie au pays de Jefferson et de Franklin.

En Dordogne, sur les flancs du vallon de Rebières, jadis creusé par des flots torrentueux, le professeur Eugène Pittard depuis dix ans travaille par les beaux jours d’été. Au pied des rocs ruginés, sa pioche a découvert une série de stations préhistoriques. De nombreux apprentissages d’élèves, plus de trente mémoires et de riches collections attestent l’importance des trouvailles que l’âge paléolithique doit aux explorations faites sous sa conduite. Après avoir abandonné ce vallon solitaire pour faire surgir en Anatolie la preuve d’un âge de la pierre taillée dont le témoignage manquait totalement en Asie Mineure, il y est revenu pour faire réapparaître un foyer de civilisation inconnu jusqu’ici. Sous le nom de « Rébiérienne » la période que cet habitat représente viendra s’intercaler entre le moustérien et l’aurignacien.

Votre Comité, et vous ne l’en blâmerez point, n’a pas hésité à se transformer en agence de voyage bénévole pour cet explorateur exceptionnel.

Mais, quittant les terres où erraient les sombres rôdeurs armés du silex taillé, gravissons le Jungfraujoch. Notre Observatoire y possède un beau télescope dont le large miroir ne peut être tourné vers l’infini, relégué qu’il est dans un local provisoire. Le professeur Tiercy, soucieux de perfectionner, en agrandissant leur champ, des observations qu’il ne peut faire là-haut qu’avec de petits instruments facilement transportables, nous a soumis le projet de construction d’une coupole qui permettra d’abriter et d’utiliser ce grand appareil. Grâce à des annuités de 10.000 francs que nous prélèverons jusqu’en 1930 sur les revenus du fonds Emile Plantamour, l’Observatoire de Genève sera pourvu bientôt d’un Institut d’Astronomie dans l’atmosphère limpide des Alpes, et notre Université d’un fleuron de plus à sa couronne.
Ce fleuron n’est pas le dernier. L’Institut Jean-Jacques Rousseau, rattaché maintenant à l’Université sous le nom d’Institut des Sciences de l’Education, a bénéficié de notre aide de pair avec la Faculté des Sciences. A l’un comme à l’autre le professeur Piaget, qui vient occuper par appel la chaire d’histoire de la pensée scientifique, apporte la certitude d’une collaboration précieuse. Nous l’avions prévue depuis longtemps déjà, et nous étions prêts à la soutenir. En outre, devant les ressources modestes que l’Institut Jean-Jacques Rouseau avait à sa disposition pour son transfert dans les vastes locaux du boulevard Carl-Vogt, saisissant d’autre part l’importance qu’a pour lui l’acquisition d’un mobilier capable d’accueillir ceux, toujours plus nombreux et accourus souvent de fort loin, qui viennent puiser à Ia source de son seignement, nous avons jugé bon de lui en fournir le moyen. Une somme de 5.300 francs a été affectée conformément à notre désir à l’ameublement d’une grande salle de conférence.
La Faculté des Lettres veut assurer à l’étude du français la position éminente qu’est la sienne dans cette maison. Une des bases de cette étude, la phonétique, vient d’être confiée au professeur Thudichurn, l’animateur des Cours de Vacances. Pour qu’elle soit amenée au niveau des exigences modernes, pour qu’elle ne soit point délaissée par les étudiants étrangers tentés de chercher mieux ailleurs, cette Faculté a décidé d’annexer au Séminaire de Français moderne un Laboratoire de Phonétique expérimentale. Ici encore, notre concours va permettre l’achat d’instruments indispensables : appareils enregistreurs de timbres, d’accents, servant à des démonstrations dont la valeur pour les étrangers, comme aussi pour les Genevois, n’échappera pas à ceux d’entre vous qui ont lu les récents articles de NI. Robert de Traz sur l’usage que l’on fait de notre langue maternelle.

Dans le même ordre d’idée, c’est en récompense d’un effort désintéressé, que nous avons déchargé de toute obligation financière envers notre Société, MM. Portier et Ruchon, auteurs de l’ouvrage « Prose parlée et prose écrite », qui rend de si appréciables services aux Cours de Vacances et à l’Ecole pratique de Français moderne.
Puisque nous en sommes aux livres, mentionnons l’importante fourniture que nous en avons faite : par une série de publications attribuées à la Faculté des Sciences économiques et sociales à l’aide du fonds Gillet ; par une quantité d’ouvrages dont la Bibliothèque publique et universitaire doit l’enrichissement aux revenus de son « fonds auxiliaire » et du fonds Moynier. Dans la Faculté de Médecine enfin, où nous avons completé la collection dépareillée d’un périodique allemand (« Deutsche Zeitschrift für die gesamte gerichtliche Medizin ») nécessaire aux relations d’information scientifique que le professeur Naville entretient avec les pays de langue française, et où nous avons permis l’achat au professeur Bujard d’un traité (Handbuch der mikroskopischen Anatomie des Menschen), dont les sept volumes contiennent la somme des connaissances actuelles en histologie humaine.

Si, pour certaines sciences, le livre peut être considéré comme l’unique complément accessoire aux enseignements donnés du haut de la chaire, il n’en va pas de même en ce qui concerne la médecine. Les études complexes qu’elle impose à ceux qui s’y consacrent, visent à l’application d’un art dont la maîtrise ne saurait s’acquérir sans le secours d’un matériel varié et trop vite caduc. Ici encore, nous voudrions pouvoir mieux associer notre effort à celui des professeurs pour remédier aux néfastes effets des amputations de crédits. Nous avons cependant la consolation d’avoir pu faire face à toutes les demandes qui nous furent adressées.

Pour les exercices pratiques des étudiants, aussi bien que pour les travaux de l’Institut de Psychologie, nous avons offert au professeur Battelli deux appareils: le comparateur Hellige, indispensable aujourd’hui aux mesures standardisées spéciales qui servent de base comparative des valeurs de différentes substances: sérums, cultures, sucres; le broyeur Latapie, qui réduit les tissus en particules infimes et dont l’emploi fraie une voie nouvelle à de multiples recherches.

Nous avons doté la salle de cours du professeur Du Bois d’un épidiascope Leitz afin qu’il puisse en quelques instants dans ses leçons faire passer sur l’écran l’image d’un grand nombre de cas à tous les stades évolutifs d’une maladie; puis nous avons ajouté à ce don celui d’un appareil Kodak pour projections qui permet la confection des clichés en économisant les frais d’un spécialiste.

Le professeur Roch compte parmi ses élèves un étudiant, M. Duchosal, qui mérite d’être félicité publiquement pour son savoir et son ingéniosité précoces. Il est à la fois l’inventeur et le constructeur d’un appareil phonocardiographique enregistrant les bruits du cœur conjointement avec l’électrocardiographe qui en marque les battements. Cet appareil se distingue de ceux qui l’ont précédé, en ce qu’il est utilisable pour des recherches cliniques qui sont appelées par leur nouveauté à un retentissement considérable dans les milieux médicaux. Nous avons été particulièrement heureux de faire profiter immédiatement la Clinique médicale des bienfaits d’un instrument si perfectionné pour l’observation sur le malade, et si pratique pour l’enseignement donné aux étudiants rassemblés.
Dans le laboratoire du professeur Wiki, ce ne sont point les troubles ou les lésions du cœur humain que l’on songe à noter, mais bien les effets causés par des médicaments ou des substances anesthésiques dont il faut étudier et contrôler l’action sur l’animal avant d’en expérimenter l’efficacité thérapeutique sur le patient. L’électrocardiographe à inscription directe (système Duchosal-Luthy) donnant des graphiques d’une netteté remarquable, rendra plus précises encore les nombreuses observations pharmacodynamiques qui sont publiées par ce laboratoire.
Du cœur humain passons à l’âme et terminons, Mesdames et Messieurs, cette nomenclature des dons faits en votre nom, en mentionnant l’appui que nous prêtons aux cours donnes par les professeurs Gampert et Berguer dans la Faculté autonome de Théologie, la doyenne vénérée de notre vieille Académie.

Il nous reste à vous parler, Mesdames et Messieurs, des fonds spéciaux qui n’ont pas participé aux allocations précédentes. Nous vous instruirons de ceux dont les revenus ont été utilisés au cours de cet exercice, en laissant au rapport financier le soin de vous éclairer sur la gestion des autres.

Bien exceptionnellement nous avons peu de choses à vous dire du Jardin alpin de la « Linnaea » et de son laboratoire de biologie. Son directeur, pour des raisons d’ordre matériel, aggravées par une longue maladie dont il relève seulement, n’a pu lui donner les soins attentifs habituels. A cette occasion nous formons les souhaits les plus vifs pour que le professeur Robert Chodat, heureusement rétabli, recouvre l’excellente santé dont son activité scientifique exceptionnelle ne saurait se passer. Malgré tous les obstacles, les belles floraisons qui dominent Bourg St-Pierre et qu’admirent, chaque été, des centaines de visiteurs, ont été maintenues et complétées sous la direction du professeur Fernand Chodat. De leur côté, les cultures de céréales à 1.700 mètres ont fourni de superbes récoltes, suivies d’une abondante distribution de semences de blé et d’avoine dans les villages haut perchés de nos Alpes. Ces bonnes nouvelles sont réconfortantes et nous consolent de l’arrêt imposé par les circonstances aux travaux accoutumés du laboratoire de biologie, qui attirent tant d’étrangers.

Le fonds Gillet pour voyages a décerné de nouveau cette année des prix de 1.000 francs aux élèves du Collège sortis premiers aux examens de maturité de leur section. Les lauréats sont MM. Richard Extermann, Charles Chatelanat, Michel Peretz et Roger Breitenbucher. Plusieurs de ces jeunes gens ont entrepris et terminé d’instructifs et beaux voyages.

L’Angleterre, le Midi, l’Espagne, l’Allemagne du Nord et celle du Sud ont reçu tour à tour leur visite. Ceux qui parmi vous ont eu le privilège de prendre leur vol au sortir du Collège, grisés de liberté, un peu anxieux de partir seuls à la découverte des beautés artistiques ou naturelles de la vieille Europe, comprendront les joies profondes que Mme Gillet-Brez a dispensées aux collégiens studieux. L’un d’eux les exprimait en terminant une carte par ces mots touchants :
« Je regrette de ne pas connaître la personne à qui je dois tant de belles heures ». Le directeur du Collège, M. Léopold Gautier a pensé, d’accord avec son Conseil des Doyens, qu’une telle récompense ne devait pas risquer d’être attribuée, comme ce fut le cas quelquefois, à des élèves moyens, se trouvant les premiers d’une classe médiocre. Partageant cet avis, nous avons modifié le règlement, avec l’approbation du Conseil d’Etat. Dès 1930, le prix Gillet ne sera plus attribué qu’aux élèves ayant obtenu comme note 5/6ème au moins du maximum. De plus nous avons estimé juste que le jury des examens soit autorisé à considérer comme ex æquo deux élèves de la même section dont les notes totales se tiennent à trois dixièmes de point (ou moins).

Enfin, nous avons accompli un dernier acte, en marquant dans nos annales le quarantième anniversaire de notre Société. C’est au cours d’une réunion intime et charmante au foyer de M. Arnold Pictet que nous avons décerné la Présidence d’honneur de la Société Académique à M. Charles Borgeaud, professeur à l’Université.

Président de l’Assemblée constitutive du 16 mai 1888, il fut le réalisateur de l’idée lancée par notre Vice-président, M. Eugène Choisy, alors jeune Zofingien. Nul mieux que lui ne pouvait être l’expression vivante des sentiments et des aspirations qui nous animent tous.

Ici se termine, Mesdames et Messieurs, le compte rendu de ce que nous avons fait en votre nom. Trop détaillé peut-être, il a du moins l’avantage de vous faire mieux connaître l’effort continu qui se développe au sein même de l’Université. Effort fécond dont les effets dépassent nos étroites limites et portent au dehors la renommée du haut enseignement genevois.

Mais ce n’est point assez ! Le rayonnement qu’une pléiade de savants étend toujours davantage sur d’autres continents doit grandir encore. Votre mission, Mesdames et Messieurs, est de vouer à cet éclat toutes vos forces morales et matérielles.

Ainsi, aux pieds de l’Alma Mater qu’elle sert depuis quarante ans, la Société Académique, continuant à aviver la flamme allumée au temps de Bèze et de Calvin, aura bien mérité de Genève.