Rapport annuel de la présidence 1937-1938

Monsieur le Conseiller d’Etat,

Monsieur le Conseiller administratif,

Monsieur le recteur,

Mesdames et Messieurs,

 

Avant que nous en arrivions au dernier acte de commémoration de cette belle année du cinquantenaire, il nous faut consacrer quelques instants à la besogne inhérente à toute assemblée générale.

Elle comporte en premier lieu la justification de l’œuvre accomplie par votre Comité. Celle-ci vous est en grande partie connue. Vous nous saurez donc gré de faire ce que vous savez déjà pour l’avoir lu ou entendu.

On peut considérer l’exercice qui prend fin comme digne de s’inscrire à une place d’honneur dans les annales de la Société Académique. Dernière période d’un grand cycle, dont on fêtera une fois encore ce soir les heureux commencements et la féconde évolution, il mérite par les importantes réalisations qui ont jalonné son cours que son souvenir soit perpétué.

A tant de sujets de satisfaction qu’il nous procure, s’ajoutent cependant quelques réserves. Elles naissent d’une pénurie d’argent dont l’an dernier déjà et avec un talent admirable, mon distingué prédécesseur, le professeur Henri de Ziegler, signalait les méfaits.

Ce défaut de ressources a maintes fois entravé et dans certains cas paralysé notre action. Ce fut là, pour votre Comité, une cause d’amer et grave souci. Et l’on ne doit point ignorer que s’il s’est trouvé dans l’incapacité de faire face à toutes les exigences de sa mission, c’est à son cuisant regret et bien contre sa volonté.

Que les victimes de cette carence momentanée soient toutefois rassurées. Les demandes pressantes demeurées en suspens seront bientôt prises en considération dans l’esprit le plus bienveillant.

Parmi les subsides généraux ou spéciaux fournis par notre Société à l’Université certains, Mesdames et Messieurs, vous sont familiers par leur constante réapparition dans nos comptes rendus.

Selon cet ordre, notre participation a été renouvelé à la constitution de la bourse Albert Galatin, fondée, il y a dix ans, et destinée aux échanges d’étudiants avec les Etats-Unis. Nous avons également réglé le bail de cette table de Wimereux autour de laquelle tant d’étudiants ont bénéficié, par un commerce plus étroit avec leur savant maitre, le professeur Emile Guyénot, d’un précieux enrichissement non seulement scientifique mais spirituel.

Comme auparavant, le Séminaire de Français moderne, l’Ecole pratique et les Cours de Vacances, dont les caisses sont réunies, ont eu recours à notre aide, mais cette fois-ci dans des conditions réjouissantes, parce que moins onéreuses.

Vous serez heureux d’apprendre que les Cours de Vacances ont retrouvé une prospérité qu’ils n’avaient plus connue depuis 1931. C’cst là un beau rétablissement, opéré en un temps de sévère concurrence. On le doit à la ténacité et au zèle de leur directeur, le professeur Alexis François, comme au patient effort de ses collègues du corps enseignant, dont le dévouement, doublé d’un extrême désintéressement, méritait d’être encouragé.

Enfin, nous avons continué à subventionner dans les facultés des Lettres, de Droit et de Théologie, des chaires aux enseignements presque tous appliqués à l’étude de divers domaines de l’histoire ancienne où moderne.

Si nous sentons que notre concours est en quelque sorte indispensable à Ia Faculté autonome de Théologie, vénérée pour avoir été jadis la pierre angulaire de la vieille Académie, nous nous efforçons de nous dégager par ailleurs de charges qui sont sans nul doute du ressort de l’Etat. Cette ligne de conduite a permis, partout où cela se pouvait sans sérieux préjudices, de réduire le montant de contributions devenues quasi permanentes et qui d’avance grèvent notre budget.

C’est à ce souci de stricte économie qu’est dû l’accueil favorable fait à la plupart des appels de caractère urgent lancés par les facultés dès le début de cette gestion.

Dans celle des Sciences, il fut paré au plus pressé en dotant le laboratoire de minéralogie d’un excellent microscope Leitz. Geste malheureusement bien insuffisant, car ce laboratoire, dont le nombre d’étudiants a doublé, souffre grandement d’une instrumentation incomplète, vieille de plus de quarante ans, inutilisable à l’heure actuelle, malgré de coûteuses et fréquentes réparations. Le professeur Marcel Gysin sait que tous nos efforts tendront à le seconder dans la rénovation de cet appareillage qu’il ambitionne à juste titre.

Nous sommes également venus au secours des Archives des Sciences physiques et naturelles, revue dans laquelle la Société de Physique insère son bulletin. Grâce aux échanges de ce périodiques ancien et renommé, la Bibliothèque publique et universitaire reçoit près de quatre cents publications scientifiques de grande valeur. Il fallait à tout prix maintenir cet état de choses, que venait compromettre un fâcheux déficit. En le comblant nous avons pu, cette fois-ci, faire le nécessaire entièrement.

La faculté des Lettres s’est adressée à nous plusieurs fois au cours de l’hiver dernier. Le cadeau d’une armoire métallique où sont dorénavant en sûreté les papyrus de la Bibliothèque, a trouvé sa récompense dans la captivante conférence sur l’histoire de ces précieux documents, offerte à la Société Académique, la veille de son anniversaire, par M. Victor Martin, alors vice-recteur.

Beaucoup d’entre vous avaient eu le privilège auparavant, d’entendre sa voix éloquente évoquer en termes particulièrement élevés, devant un buste à l’érection duquel nous avions contribué, la vie et l’œuvre du regretté professeur Albert Thibaudet.

Le cours de cinq leçons fait à l’Athénée, sous notre patronage et celui de la faculté des Lettres, par le professeur Serge Karcevski, nous a valu, d’autre part, la gratitude des milieux cultivés de notre ville. Ils ont suivi avec un intérêt soutenu le brillant exposé de ce conférencier sur le problème moral clans la littérature russe du XIXe siècle, que rehaussaient de vivants portraits d’écrivains, tracés de main de maître.

A la demande de M. le doyen Antony Babel, nous avons pris à notre charge la reliure de nombreux ouvrages destinés à la nouvelle bibliothèque consultative de Ia faculté des Sciences économiques et sociales.

Une très grande amélioration fut ainsi apportée aux conditions matérielles de travail des étudiants qui la fréquentent.

Cette série d’allocations s’est terminée par l’équipement moderne et complet du laboratoire $thérapeutique de la faculté de }de médecine. Conjointement avec le Département de l’Instruction publique, nous avons fourni au professeur Edouard Frommel tout un lot d’instruments dont le plus dispendieux est un magnifique Panphot Leitz. Cet appareil, pourvu de multiples dispositifs d’investigation, perfectionné au plus haut point, a permis au successeur du professeur Bernard Wiki, de se vouer, dès le début de son enseignement, et supérieurement armé, à la poursuite de ses travaux personnels et au contrôle des thèses dont il assume la direction.

Vous voyez, Mesdames et Messieurs, par cette énumération, que les interventions de votre Comité dans le sein des facultés furent plus nombreuses que l’an dernier. Sans avoir l’ampleur que leur donnaient auparavant les ressources maintenant épuisées de la grande souscription, elles marquent cependant  un progrès dans l’efficacité de notre aide. Cette amélioration, si légère soit-elle, doit agir sur nous tous comme un stimulant et fortifier notre volonté d’accroître sans relâche les moyens d’action dont nous disposons.

Passons maintenant aux informations relatives à la gérance des fonds spéciaux.

Le rapport que nous remis le professeur Fernand Chodat sur son activité à la Linnaea, atteste une fois encore  son ardeur à maintenir et à parfaire l’œuvre héritée de l’illustre savant qu’était son père.

Resserrant les liens qui unissent notre Jardin alpin à l’Université, il Ila choisi comme but d’excursion pour ses élèves. Parmi les bénéfices que ceux-ci ont retirés de leur séjour là-haut, on ne peut citer, faute de place, que l’étude, faite sous la conduite de leur maître, de la \,végétation des Alpes et de la variété de sa flore aux différents étages séparant Martigny des glaciers.

Conférences, cours de vacances, stages de recherches se sont déroulés selon le rythme coutumier, maintes fois décrit ici-même. Par contre, une surprise est réservée à ceux d’entre vous qui se rendront l’été prochain sur Ia colline dominant Bourg-St-Pierre.

La création d’allées nouvelles, de rocailles et de plates-bandes établies en vue d’un enseignement plus rationnel, a transformé du même coup l’aspect de la Linnaea, mettant mieux en valeur le riche coloris et l’éclat de ses fleurs qui l’embellissent. Son infatigable directeur, par le dévouement dont il fait preuve dans tant de domaines, mérite le plus vif éloge.

Puisque nous en sommes aux louanges, adressons-les, et non moins vives, aux lauréats qu’un labeur intense a placés en tête de la volée sortie en juin du collège.

Le Fonds Gillet Voyages, en garnissant au moment du départ d’une somme plus rondelette que l’an dernier l’escarcelle de Robert Chevalley, de John Metzger, de Gabriel Mutzenberg, de Bernard Chaix, les a libéralement récompensés d’un succès des plus flatteurs, dont nous leur souhaitons le renouvellement au cours de leur études universitaires.

Avant d’aborder l’important sujet de nos dernières dépenses, il reste à dire que la Bibliothèque publique et universitaire a reçu du Fonds auxiliaire une série de douze volumes de Tchemerzine : Bibliographie d’éditions originales ou rares d’auteurs français, des XVe, XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles; et que le Fonds Moynier lui a fourni l’abonnement à 32 revues de sciences sociales.

La malignité des temps vous a privés, Mesdames et Messieurs, d’un beau voyage. Votre Comité avait caressé l’espoir d’ajouter au lustre des cérémonies du cinquantenaire, celui de l’inauguration, si longtemps souhaitée et attendue, de l’Annexe de l’Observatoire de Genève au Jungfraujoch. Elle devait avoir lieu le dimanche 2 octobre.

Dès le milieu d’août, M. le doyen Georges Tiercy en avait entrepris les préparatifs, tout eu vérifiant Ia mise en place des lourds appareils qu’abrite désormais la solide construction incrustée dans les flancs glacés du Sphynx. C’est là, au centre d’un site d’une splendeur incomparable, que nous avions arrêté avec lui le programme qui vous fut transmis et dont le spectre de la guerre a repoussé l’exécution au printemps prochain. Il vous faudra patienter jusqu’à la venue des beaux jours pour entendre conter l’histoire des difficiles travaux d’édification de ce pavillon astronomique, judicieusement aménagé à une altitude exceptionnelle. On vous dira, au cours de sa visite, les avantages extraordinaires et permanents qu’il offre à l’exploration céleste. Cependant, un silence complet ne saurait être gardé à son sujet, alors que sa porte est ouverte aux chercheurs et ses télescopes déjà braqués sur un ciel limpide.

Parmi tous ceux qui contribuèrent à sa création $et à son achèvement, deux hommes dominent et méritent que leurs noms accolés soient à l’honneur dès aujourd’hui. L’un, Emile Schaer, astronome adjoint de l’Observatoire de notre ville, le promoteur qu’un destin cruel a privé de la contemplation de l’objet de sa ferveur ; l’autre, Georges Tiercy, digne successeur des Mallet, des Plantamour et des Gautier, à l’énergie et aux capacités duquel Genève doit l’admirable extension du champ de travail de son observatoire.

Au cours de ses nombreuses tentatives d’observations astronomiques sur les montagnes, Emile Schaer avait été amené dès 1922, à considérer que l’emplacement le plus favorable pour les poursuivre se trouvait sur la face sud du Sphynx, à l’endroit précis occupé par le bâtiment qu’il souhaitait voir construire.

Il avait trouvé en ce lieu la transparence et la tranquillité de l’air qu’il cherchait depuis longtemps, en vue de Ia création d’un observatoire alpin. Après y avoir continué ses expériences durant cinq années, à l’aide du gros télescope d’un mètre, lui appartenant en commun avec M. Honnegger-Cuchet, il fit part au professeur Raoul Gautier, directeur de l’Observatoire, et à M. Georges Tiercy, son successeur désigné, de son ardent désir de posséder exactement à cet endroit, un local où le maniement de ses puissants appareils serait commode et assuré. A cette proposition, il ajoutait le don généreux des deux grands télescopes dont ses mains habiles d’opticien hors-pair avaient taillé et poli les miroirs. C’est à cette date, en 1927, que Georges Tiercy, auquel il avait fait partager son enthousiasme, prit le ferme engagement d’ériger la coupole astronomique ambitionnée. Après s’être livré aux études techniques préparatoires, très compliquées, afférentes à ce projet, il en présenta les plans au Comité de la. Société Académique, en sollicitant son appui financier. Cet appui lui fut accordé en 1928, sous la forme d’annuités à prélever pendant dix ans sur les revenus du fonds Emile Plantamour. La somme globale de Fr. 3oo’ooo,- affectée à cette Annexe de l’Obscrvatoire, se répartit de la manière suivante, en y comprenant Fr. 1oo.ooo,-, valeur correspondant aux instruments qu’elle contient: Fr. 3o.ooo,- provenant de dons particuliers ; Fr. 5o,ooo,- d’apports en nature et en matériaux concédés par la direction du Jungfraubahn, et Fr. 12o’ooo,- dus à la munificence de la Société Académique.

Afin de marquer la reconnaissance particulière qu’il éprouve pour cette dernière, afin de rendre un public hommage à ses largesses, le professeur Georges Tiercy a voulu expressément que revint à notre Société l’honneur de présider la cérémonie d’inauguration, à laquelle il compte vous voir assister en foule.

Ce sera l’occasion favorable entre toutes, de mesurer les obstacles redoutables vaincus en cours d’accomplissement d’une œuvre, qui accroît magnifiquement le patrimoine scientifique de Genève, et dont le directeur de notre Observatoire est bien trop modeste pour se glorifier.

Il reste maintenant, Mesdames et Messieurs, à passer en revue 1es événements et les faits marquants qui caractérisent l’existence de 1a Société Académique au cours de cet exercice.

Cette existence fut, hélas ! assombrie par la perte cruelle de nombreux membres. Recueillons-nous afin de rendre un pieux hommage à la mémoire de Messieurs Victor van Berchem, Jean Darier, Frédéric Dominicé, Francis Guye, Ernest Bunge, Jules de Westerweller, Victor Corbaz, François Perrier et Victor Wyss-Fleury, ainsi qu’à celle de Mesdames Adrienne Coulin, Edmond Boissier et Marc Micheli.

Tous ceux que nous venons de nommer et dont nous déplorons le départ ont donné à notre groupement des marques de fidèle attachement dont le souvenir est gravé dans nos cœurs. Que leurs familles reçoivent l’expression renouvelée de notre profonde sympathie et de la part très vive que prend la Société Académique à leur affliction.

A cette séparation douloureuse, l’accueil que nous avons la joie de faire dans notre sein au fort contingent venu grossir nos rangs, apporte son réconfort. Après avoir sollicité l’an dernier votre concours en vue d’un recrutement intensif, votre Comité prêchant d’exemple, s’est adressé aux différents milieux de la population de notre ville. Cet effort de propagande n’a pas été vain : il se traduit par l’agrégation de 217 adeptes nouveaux.

D’autre part, il semblait justifié, à la veille de cette cinquantième assemblée générale, de rappeler les bienfaits de la grande souscription pour l’Université. Nous avons pensé en trouver, la meilleure manière, en conférant la qualité de membres à vie aux 194 donateurs dont la contribution n’était pas inférieure à cent flancs. Cet imposant accroissement d’effectif est réjouissant au plus haut point en ces temps de traverses et de difficultés.

Que tous ceux qui se joignent à nous au seuil de l’ère nouvelle ouverte à l’activité de Ia Société Académique et que nous saluons de Ia façon la plus cordiale, soient remerciés chaleureusement pour l’aide précieuse qu’ils lui apportent.

Au point de vue administratif, quelques changements sont encore à signaler.

Le professeur Henri de Ziegler remplace dorénavant M. Emile Rivoire dans Ia Commission de la Bibliothèque publique et universitaire. Ce dernier a motivé sa démission par les fatigues d’un grand âge que sa vigueur dément chaque jour. Nous avons dû nous incliner à regret devant sa décision. Les services éminents qu’il a rendus à la Société Académique, dès sa fondation, mettent la plus vive gratitude.

Des motifs analogues ont rendu M. Maurice Hentsch désireux d’abandonner la charge de vérificateur des comptes qu’il a remplie pendant trente-cinq ans avec une rare compétence et un dévouement inaltérable.

Nous lui en gardons également une reconnaissance infinie.

Les fêtes si réussies du cinquantenaire nous ont valu cieux dons, accompagnés d’un message touchant.

Ils nous furent offerts par le professeur Charles-Eugène Guye, l’un en son nom, l’autre en souvenir de son frère Philippe, le savant regretté dont Les travaux et l’enseignement ont jeté tant d’éclat sur l’Université.

Enfin, Madame Victor van Berchem et ses enfants nous ont fait parvenir en souvenir du grand historien dont la cité tout entière a ressenti la perte en janvier, un témoignage tangible de l’intérêt que sa famille continue à porter à la Société Académique.

Celle-ci, extrêmement sensible aux preuves d’affection qu’elle trouve dans ces attentions généreuses, en remercie très profondément les auteurs.

A ces dons sont venus dernièrement s’en ajouter d’autres ; l’un, considérable, fut immédiatement affecté à la création d’un nouveau fonds spécial. Ayant été reçus après la c1ôture de cette Section, ils seront mentionnés dans le rapport de l’an prochain.

Il est d’usage, Mesdames et Messieurs, de faire chaque année le tour des relations auxquelles nous sommes redevables de cette ambiance de sympathie et d’amitié effective si propice à l’épanouissement de notre action. Cette ambiance, c’est le peuple genevois qui l’a crée et l’a renouvelle sans cesse, depuis le temps où Calvin, entouré des syndics, fondait l’Académie.

Au plus haut représentant du souverain dans cette enceinte, M. le Conseiller d’Etat Adrien Lachenal, nous ne saurions assez dire de quel prix fut pour nous la bienveillante sollicitude dont il nous entoura. S’intéressant à nos travaux, à nos préoccupations, il nous a fait l’honneur de participer à toutes les manifestations de notre activité, montrant ainsi en quelle estime le gouvernement tient la Société Académique.

C’est également un très grand plaisir que de rappeler devant M. le Conseiller Administratif Marius Noul, représentant de la Ville de Genève, les responsabilités et les intérêts communs qui nous ont rapprochés en resserrant encore les liens qui nous unissent aux autorités municipales. La Société Académique a trouvé là une nouvelle occasion de leur prouver son entier dévouement, recevant en retour maint témoignage d’une considération qu’elle apprécie hautement.

Au Conseil d’Etat et au Conseil Administratif, étroitement associés à la Société Académique pour fêter le cinquantenaire de sa fondation, aux magistrats qui lui font l’honneur d’une somptueuse réception ce soir, nous réitérons 1’expression de notre profonde reconnaissance.

Au contraire de nos ressources, cette reconnaissance est heureusement inépuisable, et c’est un 6rand contentement que d’en transmettre l’expression avec nos vifs remerciements à M. le recteur Victor Martin, à son non moins aimable prédécesseur, M. William Rappard, ainsi qu’au Bureau du Sénat. Les facilitées accordées par les autorités universitaires, le concours prêté avec tant de bonne grâce par le corps professoral, lors des journées de mai, ont contribué à rendre notre tâche moins ardue et à la conduire au succès.

Nous sommes loin d’oublier d’autre part, que nos réussites dans les entreprises où nous avons fait appel au grand public, n’eussent pas été aussi parfaites, si le concours du quatrième pouvoir ne nous avait été accordé avec une obligeance et une libéralité sans limites. Il est particulièrement agréable à la Société Académique de dire bien haut, en ce jour anniversaire, ce qu’elle doit à la presse de notre ville et de l’en remercier publiquement.

Votre Comité, Mesdames et Messieurs, fut invité à quantité de manifestations et de solennités qu’il faut renoncer à mentionner toutes. A ses anciennes attaches avec les sociétés poursuivant un but parallèle, l’Association des anciens étudiants, et la Fédération des sociétés savantes, que président avec tant de distinction le professeur Albert Jentzer et M. Raoul Montandon, est venue se nouer celle de l’Association genevoise des femmes universitaires, que la Société Académique se félicite de compter parmi ses membres à vie.

La Société d’Histoire et d’Archéologie nous a réservé une place d’honneur lors des fêtes de son centenaire, comme la société d’étudiants Stella à son soixante-quinzième anniversaire. En nous bornant à citer ces cérémonies qui sont au faîte des invitations reçues de toutes parts, nous adressons aussi bien aux autres un grand merci parti du cœur.

Les membres de notre Comité, après avoir exposé les résultats de leur activité et les péripéties qui l’ont accompagnée, aimeraient y ajouter encore deux mots sur leur privé.

Les décisions mûrement pesées, prises à huis-clos, non sans vifs mais toujours courtois échanges de vues, le furent à partir du 2 juin dans le local tout neuf du bâtiment de la Bibliothèque. Quittant, non sans mélancolie, la salle 29 où, pendant plus de cinq lustres, ils avaient siégé, voici vos délégués dans leurs meubles.

Les volumineuses archives conservées chez M. Arnold Pictet dans un ordre irréprochable, sont maintenant rangées dans des armoires plus accessibles à la consultation. Au mur, un beau Cervin de Gustave de Beaumont, offert par notre secrétaire perpétuel, symbolise l’aspiration à l’effort bien dirigé et à l’élévation animant ceux que vous honorez de votre confiance et qui ont fait de leur mieux, cette année encore, pour la mériter.

Ils ne me pardonneraient pas de répéter ici ce que j’ai dit le 14 mai, lors de la cérémonie de commémoration, à l’égard de leur conscience et de leur zèle à réaliser votre volonté. Ils ne sauraient cependant défendre à leur président, prêt à quitter ses fonctions, de les remercier de la bienveillance et de la chaude amitié qui firent constamment de sa charge un plaisir.

Mesdames et Messieurs,

En mai dernier, nous fêtions, par des manifestations diverses, toutes également attrayantes, la fondation de la Société Académique.

Le privilège nous fut accordé à cette occasion de pouvoir honorer les deux artisans de sa création et les adhérents de la première heure que nous avons encore la joie de compter parmi nous.

Aujourd’hui, au terme de cette année de jubilé, nous nous apprêtons à fêter l’anniversaire de la première assemblée générale de notre Société tenue il y a cinquante ans, souls la présidence d’Edouard Sarasin l’ardent collaborateur de Charles Borgeaud et d’Eugène Choisy.

Le plus bel hommage qui puisse être rendu à nos lointains prédécesseurs est sans doute de faire revivre le passé, mettant ainsi en pleine clarté le magnifique développement de l’œuvre qu’ils furent les premiers à servir et à laquelle ils donnèrent la plus heureuse des impulsions.

Nul n’a paru mieux qualifié pour une telle évocation que M. Arnold Pictet, membre du Comité depuis près de quarante ans, auteur de la notice historique rédigée en 1913 à l’occasion du vingt-cinquième anniversaire de la Société Académique. Qu’ii soit remercié de s’être rendu à notre désir.

Mais avant qu’il exalte devant nous les grands actes, et les bienfaits dont ceux-ci ft1rent la source, nous voulons, dans un élan unanime de gratitude, en récompenser les auteurs.

Il  y a dix ans, j’avais le très grand honneur, au cours d’une cérémonie intime, de décerner en votre nom au professeur Charles Borgeaud, président de l’assemblée constitutive du 16 mai 1888, le titre de Président d’honneur de la Société Académique.

Ce rôle, je suis très fier de le remplir une fois encore en transmettant de votre Part au professeur Eugène Choisy, promoteur de la création de notre Société, le diplôme qui lui confère un titre identique.

A MM. Paul van Berchem, Edmond Boissier, Barthélemy-Bouvier, Albert Choisy, Edouard Favre, Alfred Mozer, Charles Patru, Emile Rivoire, Louis Willemin, à Ia Société de Zofingue d’où l’idée féconde prit son premier essor, à celle de Belles-lettres qui en favorisa le bel envol, à tous ces valeureux pionniers entourant leurs chefs, comme il y a un demi-siècle, je remets au nom de la Société Académique reconnaissante le diplôme de membre fondateur.

Mesdames et Messieurs,

Point n’est besoin de péroraison. Le spectacle qui s’offre à nos yeux en ce dernier beau jour de jubilé, suffit à définir l’idéal dont chacun d’entre nous doit être animé.

La présence dans le sein de la Société Académique de ceux qui la fondèrent en assurant ensuite sa prospérité, celle des autorités qui participent à son anniversaire comme elles prêtèrent jadis leur appui à sa naissance, tout cela évoque mieux que les paroles les plus éloquentes la valeur et l’importance de l’œuvre dont l’avenir est entre nos mains. Prenons-en soin, en nous efforçant de la développer toujours davantage, à l’exemple de nos vénérés prédécesseurs.

Qu’il soit donné à Ia Société Académique, Mesdames et Messieurs, de personnifier à l’avenir, comme dans le passé, les généreuses traditions du civisme genevois.

Coordonnant les efforts, rassemblant les offrandes de la population de notre ville, en vue de seconder l’Etat dans sa tâche de perfectionnement de l’enseignement supérieur, qu’elle demeure gardienne attentive au foyer de l‘Université.

Et qu’ainsi, prête à aviver l’éclat qu’il projette, elle exauce le vœu du grand fondateur de notre Académie, qui désirait ardemment que Genève brillât d’une pure lumière, au loin comme auprès !

 

Ch. F. Pfaeffli