Rapport annuel de la présidence 1944-1945

Mesdames, Messieurs,

Parmi tous mes aimables prédécesseurs à la présidence de la Société Académique, il en fut un qui sut, par l’excellence de sa plume, par les fleurs de sa rhétorique, créer un genre littéraire nouveau en faisant du rapport présidentiel quelque chose de charmant et d’agréable à entendre. Il est vrai que ce président d’alors avait nom Henri de Ziegler.
Ne me demandez pas, Mesdames et Messieurs, quelles que puissent être mes saines et méritoires ambitions, de chercher à imiter un genre où il n’est pas donné à chacun dc réussir.
Il n’en reste pas moins que mon remarquable et très charmant devancier nous avait donné à tous une indication, celle d’apporter à nos fidèles auditeurs des assemblées académiques des rapports
aussi clairs que concis, aussi substantiels en leur fond aride, que gracieux en leur forme légère.
N’y pouvant parvenir – et j’ai fait cependant de réc1s efforts, je vous assure – il ne me reste que deux choses à faire La première, c’est de conserver tout entière mon admiration sans limite pour ce maître dont je ne suivrai pas les traces, et la seconde, c’est de m’excuser auprès de vous de ne pouvoir faire de ce rapport le régal littéraire auquel vous auriez eu droit.
Le genre va donc changer, mais la matière reste à peu près la même, et c’est d’elle, si vous le voulez
bien, que je vais vous entretenir.
L’histoire de notre société, c’est un peu, beaucoup même, celle de notre Université, car notre seule
raison d’exister c’est de la servir dc notre mieux et selon nos moyens.
Vous décrire l’activité c1e notre comité en ses multiples séances, vous exposer tout ce qui se dit, et surtout s’exécute, au sein des nombreuses commissions présidées et suivies avec un absolu dévouement à la cause par les uns ou les autres de vos délégués, serait chose fastidieuse. À une époque où les événements se succèdent à un rythme inaccoutumé, les années deviennent d’autant plus brèves. Seuls comptent en définitive les réalisations et les actes positifs.
Durant le cours de cette année, nous n’avons pu nous consacrer que bien peu au recrutement de
nouveaux membres, ce dont nous nous excusons ; il est bien évident qu’il conviendrait d’attirer dans
nos rangs tous ceux qui ont une dette de reconnaissance personnelle envers notre Alma Mater, ct avec
eux tous ceux – plus nombreux qu’on ne le croit communément – qui reconnaissent la valeur que
représente pour Genève son Université.
Sans elle, Mesdames et Messieurs, Genève n’aurait jamais été ce qu’elle fut et ce qu’elle est, et nous
avec elle. Il serait donc permis d’admettre que tout  Genevois conscient de cette vérité, vienne nous
apporter son nom et son modeste écu. Hélas, il n’en est rien et je fais appel à vous tous ici présents
pour vous demander de bien vouloir nous aider à susciter les enthousiasmes nécessaires à toute
propagande féconde.
Quoi qu’il en soit, nos effectifs sont restés les mêmes à peu de chose près. Cependant, nous avons
eu à déplorer le décès de plusieurs sociétaires dont je vous rappelle les noms, qui évoquent pour nous
le souvenir d’hommes de bien. Beaucoup d’entre eux furent des maîtres remarquables de notre
Université. ‘Tous ont aimé Genève et 1’ont servie avec intelligence et distinction : 1e Dr F.H. Allison, MM. Félix Badel, Charles Beljean, le Professeur Georges Berguer, Robert Jouvet, chargé de cours, le Professeur Dr Ernest Métral, M. jacques Barthélemy Micheli, Jean-Louis Cayla, le Professeur Jean-Jacques Monnier, le Professeur Dimitry Mirimanoff, M. Erwin Paul Meyer.

À cette liste vient s’ajouter un nom, celui de M. le Professeur Edmond Rossier de Lausanne. L’an
dernier, presque jour pour jour, à l’occasion de notre assemblée générale, le Professeur Rossier
ayant répondu à l’appel de la Société Académique de Genève, nous faisait un exposé magistral sur
« l’Hégémonie clans l’Eulopc moderne ». Vous l’avez entendu ce jour-là pour Ia dernière fois peut être,
mais vous n’oublierez jamais l’intelligence de son exposé, la finesse de sa personnalité et l’ampleur de
ses vues larges et droites, jamais banales. Son brusque départ fut douloureusement ressenti non,
seulement à Lausanne, mais bien aussi chez nous où le retenaient de nombreux liens d’amitié.
Nous tenons ici à adresser aux familles si douloureusement éprouvées toute notre sympathie.
Cette année, comme d’habitude, nous avons répondu de notre mieux aux diverses demandes qui
nous ont été adressées. Toutes les facultés, sauf celle de droit, qui ne nous a point adressé de demande,
ont pu bénéficier ainsi de nos subsides. Notre trésorier, dans son rapport, toujours si complet,
vous dira les montants exacts de chacune c1e nos allocations. Je me borne ici à vous indiquer comment
elles se répartissent.
Pour la Faculté de Médecine, M. le Professeur de Seigneux a reçu un nouvel appui de notre part pour la confection de nouveaux modè1es utiles à son Institut de Plastique anatomo-chirurgicale.
Pour l’Institut de Chimie Physiologique dépendant de l’Ecole de Médecine, nous avons répondu à la
demande du Professeur Leuthardt en souscrivant à un abonnement pour deux ans au « Journal of
biological chemistry ».
A la Clinique infantile, que dirige M. le Professeur Pierre Gautier, nous avons alloué pour sa clinique
de pédiatrie un crédit d’une certaine importance permettant l’acquisition d’un « Biomotor », en collaboration avec un groupe de donateurs désireux de procurer à Genève un de ces appareils. Celui-ci rendrait les plus grands services à Ia Clinique infantile et à la cité tout entière dans les cas de poliomyélite provoquant la paralysie des voies respiratoires.
Par suite des circonstances actuelles l’appareil n’a pas encore pu être livré et il est à souhaiter que
les démarches entreprises puissent bientôt aboutir favorablement.
Pour la Clinique dentaire, nous avons pu aider M. le Professeur Julliard à acquérir un microscope
qui faisait défaut.
La Faculté autonome de Théologie protestante a reçu notre aide habituelle. Le Conseil de la Fondation que préside M. Paul Lachenal, nous a remerciés de notre appui indispensable à la Faculté autonome de Théologie pour assurer la stabilité de son budget et partant, le maintien de toutes ses chaires et de son enseignement.
A la Faculté des Sciences nous avons pu répondre à diverses demandes. M. le Professeur Wenger
nous a fait valoir l’insuffisance des étuves de laboratoire de micro-chimie. Répondant à ses vœux,
nous avons acquis pour son laboratoire deux étuves électriques.
Nous avons également souscrit encore une fois à l’appel dc M. Arnold Pictet, notre président
d’honneur, pour lui permettre de maintenir le matériel vivant de son laboratoire, matériel+ particulièrement utile aux recherches et aux expériences de M. le Professeur Franceschetti.
Au Professeur Parejas, pour son Laboratoire de géologie, nous avons pu remettre divers instruments
ct aider à l’acquisition d’une chambre à dessiner Zeiss.
En faveur de la Faculté des Lettres, son doyen, M. le professeur Victor martin, nous a demandé l’octroi d’un subside pour la création de listes bibliographiques. Ces listes permettront aux étudiants, dès leur entrée à l’Université, d’orienter leurs lectures ct leurs travaux sans perdre dc temps.
Nous avons accepté en outre de collaborer aux frais du cours de M. Paul Collart, notre distingué
collègue, sur l’épigraphie latine.
Nous avons remis un subside à M. Jean Magnenat, collaborateur du maitre Charles Bally ; cette allocation est destinée à contribuer aux frais de publication de la Grammaire de sanscrit du Professeur Bally, ouvrage de grande valeur et qui n’a pu être réalisé qu’avec le concours du Département fédéral de l’intérieur.
Pour le cours de M W. Tappolet sur l’histoire de la musique, nous avons réservé une certaine somme
qui allégera un peu ses charges.
La Faculté des Sciences économiques et sociales enfin n’a pas été négligée et nous lui avons donné  certains moyens pour lui permettre de faire procéder à la reliure d’ouvrages dc sa bibliothèque.
A côté de ces aides directes en faveur de notre Université, mais sans déroger à nos buts statutaires,
nous avons cru de notre devoir de répondre à quelques appels particulièrement intéressants.
M. le Professeur Wavre nous a priés de participer à la création d’une bourse destinée à un de ses plus jeunes élèves très particulièrement doué, afin de lui permettre de poursuivre ses études à Genève. C’est sans hésitation que nous avons souscrit à cette demande.
Le Professeur Liebeskind aime à rendre son cours plus vivant en convoquant ses étudiants à une Landsgcmeindc et en leur apprenant de visu ce qu’cst la démocratie directe. Pour permettre à
ces étudiants étrangers internés de se joindre à ce voyage, nous avons accepté d’apporter notre modeste appui. Nul doute que ces étudiants rentrés dans leur pays n’emportent un souvenir vivant et
durable de nos anciennes et nobles institutions.
Tout récemment encore le Comité genevois d’aide à la Hollande, que préside M. le Professeur
Stelling-Michaud, avait recours à nous. Vous n’ignorez pas l’initiative que vient dc prendre ce
Comité pour permettre à des étudiants d’Amsterdam de venir à Genève quelque temps suivre les cours de notre Université. Grâce à nous, un étudiant hollandais pourra venir 3 mois dans notre cité et
oublier, espérons-le, les horreurs de la guerre dont fut victime sa malheureuse patrie.
Je vous ai énuméré nos largesses ; je ne vous parle pas, vous le comprendrez, de toutes les demandes
auxquelles nous n’avons pas répondu faute de ressources suffisantes ou parce qu’elles contrevenaient à nos statuts, A tous ceux que nous aurions déçus par nos re{us, nous voulons dire ici nos regrets.
Nous nous rendons compte, tous les jours davantage, dc l’étendue des besoins et de la modicité de nos
ressources, qui malheureusement limite notre action et nous interdit en particulier d’aider à la publication d’ouvrages ou de thèses.
Loin d’être découragés, nous sommes tous, et vous avec nous, animés du désir d’augmenter nos
ressources ct de faire plus et mieux.
Aussi, est-ce avec une reconnaissance particulière que nous avons reçu en souvenir de M. Charles Goudet un dont de Fr. 2.ooo,-.
Le Fonds Paul Moriaud, dont mon prédécesseur vous a entretenus l’an dernier, nous permettra dès
1946 d’utiliser, ses revenus. Nous avons fixé son statut en suivant très scrupuleusement les vœux de la testatrice par un règlement approuvé en janvier de cette année.
Une Commission du Fonds Paul Moriaud a été constituée dont font partie MM. H. Audeoud, M. Borgeaud, Ch. Gautier, B. Naef et J. Sautter.
La Commission du Fonds Gillet est présidée par le .Dr H. Audeoud,  président dévoué et consciencieux, s’il en fut. Le pasteur Jean Rilliet avait été appelé à remplacer M. Emile Rivoire décédé ;Mais nommé à Zurich, il dut démissionner. M. Paul Collart, membre du Comité de la Société académique, a été désigné pour lui succéder. Le siège laissé vacant ensuite du décès de M. Robert Martin, notre ancien président, est occupé par M. le Professeur Augustin Lombard.
Prix Gillet. Quatre prix de Fr. 4oo,- ont été accordés en juillet 1945 aux 4 élèves sortis les premiers des quatre sections du Collège : Sections classique: Pierre Cornioley ; latine : Roland Michel ; Moderne : Nissim Ner ; scientifique : Bohdane Kovaliv. Les deux premiers sont genevois, le 3me  est turc et le 4me ukrainien. Ils ont tous les quatre fait leur voyage en Suisse. Deux d’entre eux ont remis leur rapport et vont recevoir la médaille Gillet.
Cette année il n’a pas été fait appel au Fonds Gustave Moynier.
En revanche, le Fonds auxiliaire de la Bibliothèque et universitaire a permis l’acquisition du 4me volume de la Berner Chronik de Diebold Schilling.
Les événements politiques ct militaires de l’été 1945 n’ont pas encore permis la réouverture des cours de vacances de La Linnaea. M. le Professeur Chodat prépare la saison 1946 et l’on peut escompter la venue de nombreux étudiants étrangers. La question du logement à Bourg-St-Pierre présente
toutefois de sérieuses difficultés auxquelles cherche à parer M. Chodat. Ce dernier a procédé cette année à la reconstruction d’un groupe de rocailles et à l’acquisition des plantes nécessaires à la garniture de ces rocailles. Ces années de guerre auront été consacrées à l’amélioration du jardin, tandis que les années qui viennent seront de nouveau vouées au travail de recherches scientifiques auxquelles
sont conviés dès maintenant les biologistes de notre pays et de l’étranger.
Le Nouvel institut de Physique . M. Gustave Hentsch avait l’an dernier l’agréable devoir de vous annoncer la constitution du Fonds 1944 pour  l’Institut de Physique et l’Université, fonds dont la Société Académique se trouve être la gérante.
De nouveaux donateurs sont venus s’inscrire à la suite déjà longue de ceux qui, l’an dernier, en furent
les initiateurs. D’autres souscriptions sont encore promises qui viendront augmenter cc capital déjà
important, L’année 1915 a permis de prendre connaissance du résultat du concours restreint qui eut
lieu entre plusieurs architectes, pour le futur bâtirent de l’Institut de Physique et que subventionna
notre société. Le jury remit le premier prix à M. D. Honegger, architecte. Il vous a été du reste donné de juger les travaux du concours qui furent exposés à l’Université. Le Département des Travaux
publics a décidé, d’accord avec la Commission ad hoc chargée de la préparation du concours, de demander au lauréat des plans détaillés en lui confiant l’exécution du travail en collaboration
toute fois avec un bureau d’architectes à Genève. Notre vœu le plus cher cst de voir maintenant ce projet entrer rapidement dans la phase de l’exécution. Il appartiendra à notre nouveau Grand Conseil
de voter les crédits voulus et au Département des Travaux publics, avec l’appui du Département de l’Instruction publique, dc tout mettre en œuvre pour cette réalisation.
Les grands travaux projetés pour là reconstruction de l’hôpital, voire de la Caserne, ne doivent pas faire oublier notre Université et l’effort généreux de tous ceux grâce à qui fut permis la constitution du fonds en faveur du nouvel Institut dc Physique. Une commission de spécialistes, avec le concours de M. le Professeur Weigle, sera désignée pour donner au plan définitif tous les correctifs nécessaires, pour empêcher surtout que des erreurs ne se commettent et enfin pour tenir un compte exact des
expériences qui ont pu être faites ailleurs, dans le domaine gigantesque de la physique, car nul doute
que sous peu nos étudiants, sous l’égide de leur maître, ne désirent tous faire quelque expérience
 » atomique « qui n’irait pas sans comporter quelque risque pour le quartier de même que pour la ville
entière si toutes les précautions n’étaient pas prises dès le début.
Fonds pour les Etudes classiques. Un généreux anonyme a offert de remettre à la Société Académique
une certaine somme à condition toutefois que notre société puisse réunir de son côté une somme complémentaire. Ces deux montants permettraient de constituer un fonds de départ qui devrait s’accroître de nouveaux dons ou legs et dont les revenus serviraient à permettre à des étudiants de notre Université de parfaire leurs études classiques par des voyages ou des séjours d’études à Rome, à Athènes ou en Orient. Une commission a été désignée pour examiner l’opportunité dc ce fonds et les moyens de le constituer rapidement. MM. Ch. Gautier, Louis Blondel et Paul Collart n’ont pas eu de peine à démontrer l’intérêt qu’il y aurait pour nos étudiants à pouvoir bénéficier d’une bourse leur facilitant, soit l’admission à l’Ecole d’Athènes où la Suisse a droit à une place, soit un séjour à Rome où certain projet tout récent  autoriserait la Suisse à avoir sa maison d’études.
Depuis trop longtemps nous vivons enserrés dans nos étroites frontières, i1 est temps de les rouvrir et de permettre à nos jeunes d’aller puiser en terre classique l’eau vive nécessaire au maintien de notre culture. Nous espérons pouvoir compter sur votre collaboration et vous annoncer l’an prochain que ce projet est devenu une réalité.
Fonds général de l’Université. Depuis un certain temps déjà, le Président du Département de l’Instruction publique, considérant que les besoins de notre Université peuvent ne pas toujours correspondre aux crédits votés dans le budget ordinaire de l’Etat, avait émis l’idée de constituer un fonds général de l’Université. C’était aller au devant des plus chers désirs du recteur, M. Antony Babel,
ct de l’ Alma Mater toute entière.
Lors de la cérémonie du Dies Academicus, M. Babel, dans son discours, indiquait très exactement les besoins multiples de l’Université, qui, malheureusement, ne pouvaient être satisfaits par aucun crédit ni subside et il marquait la nécessité de combler rapidement cette lacune par la constitution de ce Fonds général de l’Université. C’est chose faite maintenant comme vous l’aurez certainement appris.
La Société Académique est trop consciente de toutes les tâches de notre Université pour s’être
désintéressée de cet objet. Grâce à l’amabilité de M. le Recteur Babel, nous avons été associés aux
travaux préparatoires de Ia ffndation. Nous avons fait mieux encore en remettant au Fonds général
de l’Université une somme de{,r.52.976,4o que nous préièverons su1 notre Fonds pour l’Université’
Cette somme, avec tous les fonds sans affectation
spéciale dont disposait 1’Ur.riversité, a permis d’arrondir à fr. z5o,ooo,- Ie capital d’entrée du
Fonds général de 1’Université. Ce capital est minime si on le compare à la fortune d’autres universités
et nous songeons à Bâle, en particulier, mais c’est un départ et nous félicitons vivement,
et X{. le Conseiller d’Etat Adrien L.{CHENÀL, et
M. le Recteur B.qeer d’avoir en peu de temps réalisé cette œuvre à laquelle coopéreront non seulement
l’Etat, nous l’espérons, mais également, et avec grand désintéressement, les professeurs.
Le Fonds général constitue une fondation de droit privé. Il est administré par un conseil de
quinze membres. Douze seront des représentants de l’Université, trois seront désignés par la Société
Académique. MM. G. Hentsch, Ch. Gautier et B. Naef feront partie de ce premier conseil.
Ne pensez pas, Mesdames et Messieurs, que l’existence de ce Fonds général de l’Université soit
de nature à faire perdre de son importance ou de son utilité à la Société Académique. Les besoins de
l’Université sont tels et de nature si diverse que jamais nos ressources même additionnées ne suffiront
à les satisfaire intégralement tous. C’est la raison pour laquelle nous avons salué avec joie la
constitution du Fonds général, tout en marquant notre vive reconnaissance à l’Université d’avoir permis à la Société Académique de collaborer avec elle, ce qui évitera toute possibilité d’un emploi non absolument rationnel  et justifié de nos fonds respectifs.
Suivant une tradition  bien établie, nous fûmes conviés aux manifestations les plus marquantes de la vie universitaire. Tant au Dies Academicus, qu’à la séance d’ouverture des cours de l’Université, il nous fut accordé le privilège d’entendre le recteur exposer ses vues toujours larges ct humaines à son vaste auditoire. Puissent les paroles apaisantes qu’il sut apporter en ces deux occasions, être comprises de tous.
La Faculté des Sciences économiques ct sociales célébrait le trentième anniversaire de sa fondation.
Elle choisit cette heureuse circonstance pour  fêter deux de ses plus éminents professeurs, MM. Hersch et Folliet. Nous tenons à adresser ici même nos félicitations et nos vœux à la benjamine dc nos facultés et à ses deux maîtres qui l’ont hautement honorée.
Les habitants de la Commune de Chambésy et les amis de M. Robert Martin, ancien président de notre Société, décédé dans des circonstances présentes à la mémoire de chacun le 1er août 1944, ont tenu à rappeler son souvenir en lui érigeant un monument, modeste comme il l’eut désiré, à l’endroit même où la mort vint le surprendre. Nous nous sommes associés avec ferveur à l0hommage ainsi rendu à ce bon citoyen.

A toutes les activités  multiples auxquelles a pris part votre comité durant cette année, il en est une plus ingrate et à laquelle vous allez, bon gré mal gré, vous associer. La révision de nos statuts s’imposait sur certains points et nous espérons que vous y souscrirez sans bataille, car nous ne vous proposerons rien de spécialement révolutionnaire.

MM. G. Hentsch, M. Borgeaud, H. Audeoud, A. Bernoud, A. Lombard, F. Pfaeffli, H. de Ziegler, sont arrivés au terme de leur mandat mais il vous sera loisible dc leur renouveler votre confiance. M. Jacques Mirabaud ayant désiré ne pas continuer ses fonctions de contrôleur des comptes, nous vous proposons pour le remplacer, M. Max Rappard.
A la fin de ce trop long rapport, mais pour le couronner, il me sera permis, au nom de la Société
Académique, au nom de vous tous, Mesdames ct Messieurs, de remercier tout particulièrement M. le
Conseiller d’Etat Adrien Lachenal qui, tout comme notre Général, désire rentrer dans le rang, de le remercier dis-je, de tout cc qu’il a fait pour notre Université. Il n’est pas dans les habitudes genevoises dc faire de grands panégyriques, c’est bien ct j’y acquiesce, Qu’il sache simplement, au moment où il va laisser à d’autres mains la présidence du Département de l’Instruction Publique, combien nous avons su apprécier les efforts qu’il fit toujours pour améliorer les conditions matérielles et culturelles de notre Alma Mater dans une période particulièrement difficile. Notre reconnaissance va aussi à M. le Recteur Babel ct à ses collaborateurs MM. les Doyens des Facultés, qui toujours ont mis toute leur complaisance à faciliter notre tâche.
Grâce à eux, grâce à tous mes collègues au dévouement inlassable, elle fut tout plaisir.
Pour la première fois depuis six ans, notre Assemblée générale tient ses assises dans la paix enfin recouvrée. Et nous sommes tous ici pour nous en réjouir. Nous sommes depuis peu délivrés de ce
cauchemar lancinant et atroce que fut pour nous la guerre. Romain Rolland, après l’autre mêlée,
marquait avec infiniment de raison que  » la paix n’est point l’absence de guerre, c’est la vertu qui
naît de la vigueur de l’âme ». La guerre n’est plus, mais il convient de redonner de la vigueur à l’âme « ,
à l’âme encore débile du monde,  de chacun d’entre nous. Qui mieux que notre Université pourrait s’y
employer ? Tâche superbe ct généreuse. Sans rien oublier du passé atroce que l’humanité a vécu, elle
peut ct elle se doit d’orienter notre jeunesse qui sera l’élite de demain, celle qui sera aux responsabilités, vers cet avenir de paix.
Et nous, Société Académique de Genève, soyons heureux si en nous mettant humblement au service de notre Alma Mater, nous pouvons l’aider à accomplir toujours mieux sa magnifique mission.

Bernard NAEF, président