Rapport annuel de la présidence 1998-1999

André Hurst, président
16 février 2000

Deux beaux sujets de satisfaction

Deux opérations sont plus particulièrement à signaler cette année, deux circonstances qui ont clairement mis en évidence l’action de la Société Académique de Genève : le démarrage du Forum de l’Université, la pose d’une œuvre d’art en façade du nouveau bâtiment « Uni-Mail ».

Ces deux opérations ont des points communs : toutes deux sont issues d’une initiative prise par le comité, approuvée par nos assemblées générales, et toutes deux sont de nature à donner à notre action cette visibilité sur laquelle nous nous interrogions l’an passé, et sans laquelle nous risquons de pécher par excès de discrétion.

L’arc de Bernar Venet

C’est le 12 novembre 1999 que l’Université de Genève, à l’occasion d’un dies academicus exceptionnellement retardé pour diverses raisons, inaugurait son nouveau bâtiment d’ »Uni Mail », dont le programme architectural est désormais complété. On se souvient peut-être que nous avions prévu d’orner la façade principale de ce bâtiment par la pose d’une œuvre du sculpteur Bernar Venet (l’orthographe inhabituelle du prénom est un choix explicite de l’artiste). Acquise depuis plusieurs années, cette œuvre attendait dans le parc de l’Ecole Emilie Gourd, à Malagnou, le moment d’être transportée au lieu prévu pour elle. Or, il se trouva que de l’avis commun, y compris l’avis du sculpteur, cette œuvre ne convenait pas à la façade du nouveau bâtiment : les proportions s’accordaient mal ; en outre, cette sculpture s’était acclimatée dans le parc où on l’avait installée, elle est fort appréciée des passants, et l’arracher de ce qui était devenu son cadre devenait de plus en plus délicat… Bernar Venet eut alors la généreuse idée d’offrir une œuvre conçue sur mesure, et dont nous n’aurions à prendre en charge que les coûts strictement matériels : métal, fabrication, transport, installation. Ce fut chose faite, et plus vite dite que faite d’ailleurs, comme on s’en souviendra longtemps encore, – et l’on songe ici tout particulièrement à notre secrétaire qui fut mise durement à contribution : que le lecteur de ce rapport veuille bien imaginer l’épopée que représenta pour cette sculpture de grande taille le transport depuis la Hongrie (où l’œuvre fut fondue, puis chargée sur deux camions), le problème de l’exemption des droits de douane (vous n’avez jamais rempli le bon papier, les camions ne passent pas à l’endroit prévu), la question du logement à Genève d’ouvriers monteurs hongrois ne parlant pas le français (merci au professeur et à Madame Cramer, cette dernière hongroise d’origine, qui les ont chaleureusement accueillis à leur domicile), la question de leurs rapports de travail avec leurs collègues genevois, bref, et ce fut un miracle, l’arc noir de métal qui forme un si beau contrepoint à l’architecture du nouveau bâtiment de l’Université fut prêt à temps pour être inauguré en présence de la présidente du gouvernement cantonal genevois, de la présidente de la Confédération suisse, du nouveau recteur de l’Université, et de Bernar Venet. Ce fut l’occasion de remercier Bernar Venet pour son geste, ce fut aussi pour beaucoup de ceux qui assistèrent à cette cérémonie l’occasion d’entendre parler pour la première fois de la Société Académique ; la sculpture, elle, demeurera pour longtemps un témoignage de notre action, témoignage visible quotidiennement par tous.

Le Forum de l’Université

Le Forum de l’Université, pour lequel nous avions fixé le thème « Racisme et intolérance », avait bénéficié des soins attentifs de bien des membres de la communauté universitaire depuis le lancement de l’idée. Au cours de l’année 1999, notre ambassadeur auprès des organisations internationales, son Excellence Walter Gyger, s’est personnellement employé à provoquer un rapprochement entre l’Université et les institutions internationales, dans le cadre desquelles ont prévoit justement des journées sur le racisme en 2001. Le pont jeté, il a été possible au comité de donner le feu vert à un excellent projet commun des facultés de théologie et des sciences économiques et sociales, piloté par les professeurs François Dermange et William Ossipow. Soucieux de donner une coloration bipolaire à leur titre, ces deux collègues ont choisi l’intitulé « Racisme et tolérance » ; le programme a débuté le 30 novembre 1999 et sa première phase s’achèvera en novembre 2000, il sera donc temps d’en rendre compte dans le prochain rapport. Pour l’instant on ne saurait trop recommander à chacun de suivre le cycle passionnant des conférences et colloques, illustré par la présence de personnalités de premier plan, et dont le détail est affiché dans les bâtiments universitaires en même temps qu’il est annoncé par voie de presse.

Bien évidemment, notre action ne se limite pas à ces deux cas particulièrement médiatiques, et ce rapport vous donnera le détail des allocations accordées durant l’année.

N’oublions pas, à ce propos comme à tant d’autres, de signaler notre nouveau site internet, annoncé l’an dernier, et que l’on peut désormais consulter à l’adresse : http://societe.academique.unige.ch

On trouve par ailleurs tel site internet signalant notre participation : c’est ainsi que le site universitaire de la « Passerelle science-cité » mentionne l’appui que nous avons accordé au « Jeu de Lune » dans la rade de Genève, organisé par l’observatoire à l’occasion de l’éclipse de soleil du 11 août 1999. Techniquement, il importera de développer le système des « liens » qui doit raccorder ces divers sites au nôtre.

Ressources et nouvelles ressources

Le rapport de notre trésorier montrera qu’en dépit des craintes exprimées l’an dernier, nous sommes parvenus à maintenir de bons revenus, et donc à ne pas trop diminuer notre aide financière à l’Université de Genève. De plus, nous avons été honorés d’une nouvelle donation :

–  le Fonds Han Suyin a été créé et son règlement adopté par le comité de la Société Académique. L’illustre romancière a situé son aide dans la perspective d’un dialogue scientifique et culturel avec l’Inde et la Chine. Nous ferons évidemment tout ce qui est en notre pouvoir pour que sa donation serve à poursuivre les objectifs ainsi définis.

– le Fonds Pierre Madame Jean Augsburger-Bouvier a créé un nouveau fonds en faveur de la recherche en astronomie dans le cadre de notre observatoire. Le fonds portera le nom de son frère, à la mémoire duquel la donatrice le dédie.

Que ces donatrices trouvent ici l’expression de notre gratitude, en attendant celle des bénéficiaires dont elles auront ainsi favorisé les recherches.

Réunion des présidents

La réunion annuelle des présidents de sociétés académiques de Suisse s’est déroulée à Lausanne-Dorigny. Ce fut l’occasion de visiter la Fondation Jean Monnet pour l’Europe sous l’experte direction du professeur Henri Rieben. Ce fut aussi, comme à l’accoutumée, l’occasion de faire le point sur les diverses situations des universités de Suisse et sur les difficultés qu’elles rencontrent en ce moment.

 Renouvellement du comité

Selon l’usage, nous devons procéder à l’élection d’une partie de notre comité. Rappelons que les mandats des membres du comité sont de deux ans, renouvelables. Une partie des mandats débute lors des années paires, l’autre lors des années impaires. Nous soumettons par conséquent à vos suffrages les noms des membres du comité qui acceptent cette année le renouvellement de leur charge pour deux ans. Ce sont, par ordre alphabétique, Messieurs
Jean-Louis Fatio et Renaud Gagnebin. L’an dernier, dans notre 110ème rapport, nous avions par anticipation (et donc, formellement, par erreur) fait figurer le nom de Monsieur Ferdinand Naef dans la composition du comité ; en fait, Monsieur Ferdinand Naef vous est aujourd’hui proposé comme nouveau membre du comité en remplacement de Monsieur Hans Luzius Senti, lequel l’a expressément désigné pour être soumis à vos suffrages en vue de lui succéder. Un second membre du comité a souhaité renoncer à sa tâche : il s’agit de Monsieur Nicolas Pictet ; dans un cas comme dans l’autre, nous savons ce que nous perdons avec ces départs et ne pouvons que les regretter vivement. Nous saisissons par conséquent cette occasion pour remercier ces deux membres sortants de leur contribution à nos travaux.

Nous n’avons pas oublié, pour ce qui touche la composition du comité, le vœu légitime de l’assemblée d’y voir figurer également des personnalités féminines. Des propositions vous seront soumises : il est trop tôt encore, au moment d’écrire ces lignes, pour les faire figurer dans ce rapport, mais espérons qu’au moment de l’assemblée, les propositions seront prêtes.

Remerciements et réflexion d’avenir

Le président se réjouit de pouvoir remercier une fois de plus notre fidèle secrétaire Madame Caroline Baltzinger, qui, en cette année un peu exceptionnelle, n’a pas plus que d’habitude ménagé ses efforts. Les membres du comité, pour le dévouement dont ils font preuve avec la plus totale abnégation, méritent également la reconnaissance et du président et, surtout, de tous nos membres.

Sur un point, une réflexion est engagée que nous vous soumettrons pour terminer. Devant le nombre des échecs rencontrés lors du soutien accordé à de jeunes chercheurs désireux de se lancer dans la recherche, la plupart des institutions présentes sur ce terrain en sont arrivées, au cours des dernières décennies, à édicter des règles limitatives parfois extrêmement strictes. Pour avoir quelquefois parié sur de mauvais chevaux, on n’entendait plus prendre le moindre risque ; la règle générale est ainsi devenue : « volons au secours de la victoire ! ». Si l’on caricature un peu, le résultat est que le jeune chercheur doit commencer par des années au cours desquelles personne ne veut rien faire pour lui, et s’il parvient – on ne sait trop comment – à persévérer jusqu’au moment où il aura déjà obtenu des résultats tangibles, on ira jusqu’à se bousculer pour le soutenir. Dans ce contexte, notre comité a voulu ouvrir une brèche : il a réuni cette année un certain nombre de critères lui permettant de faire annuellement une ou deux exceptions aux principes adoptés par ses prédécesseurs, principes dont il n’entend pas contester la sagesse, bien entendu ; il semble toutefois que l’avenir de la recherche mérite une réflexion renouvelée et des soins constants. Les lecteurs qui voudraient ici nous faire part de leurs expériences et de leurs suggestions seront particulièrement bienvenus.