Rapport annuel de la présidence 2015-2016
Patrizia Lombardo, présidente
24 novembre 2016
La Société académique et la valorisation de la recherche
Je voudrais commencer par l’innovation que j’avais brièvement annoncée l’an dernier : le projet de la mise en ligne des demandes des requérants a non seulement avancé, mais, dès cet automne, le système est lancé. Cette opération a été portée à terme grâce à l’excellent travail de Mme Caroline Baltzinger et de M. Jean-Michel Dayer, lequel a piloté le projet pendant deux ans. Il fallait intelligence, attention à mille détails et une patience infinie ; je les remercie vivement pour leur dévouement, ainsi que tous les membres du Comité qui se sont prêtés à des essais. Je propose d’applaudir leur effort et le succès de cette entreprise qui met la Société académique au pas avec les temps et garantira une plus grande efficacité pour gérer les requêtes du côté des requérants et des membres du Comité.
Une autre activité de cette année a été la réorganisation du Jardin alpin La Linnaea, propriété de la SACAD depuis 1915. La Présidence de la Commission de La Linnaea avait été assurée pendant presque vingt ans par feu Jaques Naef, membre d’honneur. La nouvelle Commission, présidée M. Pierre-André Loiseau, a réaffirmé l’attachement de la SACAD à cette propriété et a décidé d’apporter des adaptations aujourd’hui nécessaires au chalet annexé au jardin alpin. L’aménagement intérieur du chalet a été amélioré par quelques travaux, l’équipement a été renouvelé là où cela était indispensable, et à présent le chalet peut héberger, pour un prix très modéré par nuit, 19 personnes, appartenant à la communauté universitaire ou non, pour un séjour scientifique, sportif ou de détente. Que la commission récemment constituée soit vivement remerciée pour son engagement dans ce travail qui a demandé beaucoup de temps et beaucoup d’attention pour des détails de tout ordre.
Parmi les activités soutenues par la SACAD, je tiens à signaler le succès du projet FOREMANE II : Optogénique et stimulation profonde intracérébrale dans l’addiction et les troubles de désordre obsessif de comportement. M. Jean-Michel Dayer, président de la Commission FOREMANE, a rendu compte du rapport du professeur Christian Luescher lors de la séance de juin. Le Comité de la SACAD a pris acte des progrès de FOREMANE II et approuvé la continuation du financement pour une seconde année jusqu’au 31 novembre 2016.
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Dès sa création en 1888, la Société académique vise à mettre en valeur la recherche. Eugène Choisy et Charles Borgeaud, les deux étudiants genevois qui fondèrent la Société académique, avaient compris l’importance de l’aide financière pour soutenir l’Université de Genève dans une période où l’État connaissait des restrictions. Le lien entre l’Université, la Cité et le savoir dans toutes ses formes leur avait paru essentiel. La Société académique de Genève reste fidèle à cette mission fondamentale qui réunit deux lieux indispensables à l’existence humaine. Rechercher et connaître : comment concevoir la vie sans cette tendance ? Dante l’exprimait dans La Divine Comédie par les mots d’Ulysse à ses compagnons les exhortant à de nouvelles entreprises : « Pensez à ce que vous êtes : point n’avez été faits pour vivre comme des brutes, mais pour rechercher la vertu et la connaissance (Enfer, chant XXVI, traduction de Félicité Robert de Lamennais). » Aujourd’hui, on parle de valorisation de la recherche et de knowledge tranfer ou transfert de connaissances pour signifier les échanges qui ont lieu entre le monde de la recherche et le monde de la production. On insiste de plus en plus, dans les institutions vouées à la recherche dans plusieurs pays du globe, sur la nécessité des rapports entre l’Université et l’industrie. Nous sommes de plus en plus conscients que l’Université n’est pas un univers isolé, mais entre en contact avec la société dans ses aspects les plus différents. Nier ces rapports signifierait une incapacité de répondre à l’appel du présent, de tenir compte des transformations indispensables et inéluctables afin que la vie continue.
Les relations entre le monde pratique et le monde de la recherche, entre l’observation et l’application, existent depuis longtemps et l’histoire des sciences et des techniques est riche d’épisodes qui ont marqué les résultats de ce lien, parfois avec un saut de siècles, comme le célèbre exemple du mathématicien et ingénieur Héron d’Alexandrie, auteur du Traité des pneumatiques, des Automata et des Métriques: ce savant du premier siècle après J.-C. invente et construit un moteur à vapeur qui sera réalisé et commercialisé entre le XVIIe et le XVIIIe siècles par des ingénieurs, fabricants et professeurs en France et en Écosse.
Aujourd’hui, nous vivons dans un monde qui veut surtout des résultats immédiats. Il ne faudrait néanmoins pas donner aux termes « valorisation de la recherche » le seul sens d’innovation et de développement par l’exploitation commerciale instantanée des résultats de la recherche. L’attention aux exigences contemporaines ne devrait pas faire oublier un élément essentiel de la recherche, de sa nature même : la nécessité de penser et travailler avec un temps qui est celui de l’expérimentation mentale et pratique. Je ne parle pas ici de différences disciplinaires, de la courante et très générale différence entre les sciences dures et les sciences humaines – il serait peut-être plus juste de partager les sciences entre celles qui sont fortement expérimentales et celles qui sont essentiellement spéculatives, où le côté expérimental est de l’ordre de la pensée pure (comme en mathématique et philosophie) ou de l’investigation historique (comme en histoire et littérature). D’ailleurs il existe un ferment qui essaie de conjuguer des chercheurs en sciences spéculatives et en sciences expérimentales.
Pour faire de la recherche, il faut prendre des risques, et le fait de prendre des risques ne donne pas des résultats immédiats. Une des angoisses de l’époque contemporaine est l’anxiété de ce que certains historiens ont appelé « présentisme », c’est-à-dire l’importance despotique donnée au présent négligeant le passé et le futur. Le présent dévore tout. Dans le rapport de l’an dernier, j’avais parlé du lien entre le passé et le présent ; cette année, je m’arrête brièvement sur le lien entre le présent et le futur. La Société académique se préoccupe de ce lien : notre souci de la relève vise à faciliter autant que possible le futur des jeunes chercheurs, à leur permettre d’avoir le temps de penser, en allant à une conférence à l’étranger, en faisant un voyage d’étude – comme cela a été souvent souligné dans les rapports de la Société académique, nous restons attentifs aux gros projets et aux petits qui peuvent être très utiles à la formation des chercheurs. Cette année le FNS, qui a favorisé l’avancement de la recherche en Suisse, a introduit des changements qui seront effectifs déjà cet automne. Parmi ces modifications, il y a en a une qui annonce que les requérants doivent être titulaires d’un doctorat depuis quatre ans au minimum – et non plus deux ans. Nous l’avons rappelé l’an dernier : nous recevons un grand nombre de requêtes, et je pense que cette nouvelle donne au niveau du FNS rendra encore plus utile l’aide que nous serons en mesure d’offrir à notre relève genevoise, respectant toujours les souhaits des donateurs et les caractéristiques de nos différentes commissions.
Le monde contemporain est de plus en plus complexe, économiquement, politiquement et moralement, mais, grâce à l’attention de notre trésorier et des membres de notre Comité et de nos commissions, nous continuons la mission de la SCAD en essayant de valoriser la recherche qui émane de notre université, fidèles au geste initial des deux fondateurs.
Activités de l’année 2015-2016
1) Répartition requêtes 2015-2016 pour près d’un million :
28 participations à des congrès ou voyages d’étude
16 achats d’appareils scientifiques
2 contributions à des frais d’impression (livres, actes de congrès, etc…)
26 subsides divers, destinés à l’organisation de colloques, de cours ou à des attributions de bourses ou autres projets de recherche.
2) Quelques autres événements :
– Prix Gillet Voyage 2015, 3 prix attribués :
1er Prix à Mme Zélie Gottraux pour son projet sous forme d’un périple à vélo de quatre semaines en Tasmanie.
2ème prix à MM. Yael Frischholz et Maxime Mailhot pour leur projet de voyage en Inde du Nord et séjour à l’Université de la terre.
3ème prix à M. Lorenzo Lamarche pour son projet à la découverte du Caucase du Sud pendant un mois (Azerbaïdjan, Géorgie et Arménie).
- Bourse Philibert Collart attribuée à M. Jacques Volet pour sa thèse intitulée : États épistémiques et intérêts pratiques et à M. Eduardo Saldana pour sa thèse intitulée : The Rational Element of the Soul in Plato’s Republic.
3) Quelques subventions et interventions importantes :
- Acquisition d’une station de test pour semi-conducteurs, équipement essentiel pour les projets de recherche du FPNC.
- Financement pour un appareil d’analyse génétique monocellulaire (« POLARIS ») destiné à de multiples groupes de recherche fondamentale en médecine et en sciences.
- Financement d’un appareil Seahorse et chambre d’hypoxie
- Achat d’un microscope confocal super-résolutif.
- Acquisition de matériel de recherche d’électrophysiologie in vitro.
- Participation au projet Voix de l’Université de Genève.
- Participation à l’organisation du Colloque Le Cours de Linguistique générale, 1916-2016. L’émergence.
4) remplacements et renouvellement :
Représentation au Fonds général de l’Université : M. Frédéric Naville quitte la représentation de la SACAD au Fonds général de l’Université. Nous le remercions d’y avoir siégé plusieurs années. Mme Monique Caillat a bien voulu accepter de le remplacer ; qu’elle en soit vivement remerciée.
Commission du Fonds Edouard Frommel : Merci à M. Michel Grandjean d’avoir accepté de remplacer Mme Nicole Fatio dans cette commission.
Commission du Fonds de Biologie : M. François Barja est remercié d’avoir accepté de faire partie de cette commission.
Déléguée à la Fondation des Archives Piaget : Mme Patrizia Lombardo remplace Mme Nicole Fatio qui y a siégé plusieurs années.
Renouvellement des mandats au Comité : Les membres suivants sont proposés à l’Assemblée générale du 24 novembre 2016 pour un renouvellement de deux ans conformément aux statuts: MM. Henri Bounameaux, Bénédict de Candolle, Jean-Michel Dayer, Eric Allémann, Jean-Claude Martinou, David Sander, Nicolas Zufferey.
5) Remerciements
Je remercie le trésorier M. Renaud Gagnebin, l’administratrice Mme Caroline Baltzinger, tous les membres du Comité et tous les membres des nombreuses Commissions ainsi que tous les membres de la SACAD, qui sont désormais au nombre de 512. C’est grâce à leur sens de responsabilité et à leur dévouement que la SACAD peut accomplir sa tâche.